Face à l’offensive fulgurante des rebelles syriens contre le régime de Bachar al-Assad, une voix influente s’élève en Irak pour prôner la retenue. Moqtada Sadr, chef de file de la communauté chiite irakienne, a appelé jeudi son pays à ne pas s’ingérer dans le conflit qui fait rage chez son voisin syrien. Un appel à la neutralité qui intervient alors que certaines factions armées irakiennes pro-iraniennes avaient par le passé combattu aux côtés des forces gouvernementales syriennes.
L’Irak sommé de rester en dehors de la « fournaise syrienne »
Dans un message publié sur les réseaux sociaux, Moqtada Sadr a souligné « la nécessité pour l’Irak, son gouvernement, les milices et les forces de sécurité de ne pas s’ingérer dans les affaires de la Syrie ». Le leader chiite est allé plus loin en exhortant les autorités irakiennes à « empêcher » toute tentative d’intervention, comme « certains en ont pris l’habitude par le passé ».
Un appel qui fait écho à celui lancé par Ahmed al-Chareh, chef du groupe rebelle islamiste Hayat Tahrir al-Cham (HTS), fer de lance de l’offensive anti-Assad. Ce dernier a directement interpellé le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani, l’exhortant à « empêcher l’Irak d’entrer dans la nouvelle fournaise de ce qui se passe en Syrie ».
Bagdad définit ses « lignes rouges »
Si l’Irak semble pour l’heure décidé à ne pas mettre un pied dans le bourbier syrien, certaines « lignes rouges » pourraient toutefois le faire changer d’avis. Interrogé par l’AFP, un responsable irakien a ainsi averti que Bagdad pourrait revoir sa position si « les forces terroristes progressaient vers l’est de la Syrie en direction de Raqa et Deir Ezzor pour se retrouver plus près de la frontière irakienne ».
Autre scénario inacceptable aux yeux de l’Irak : une avancée rebelle en direction de Damas qui menacerait le sanctuaire chiite de Sayyeda Zeinab, haut lieu de pèlerinage pour la communauté chiite. Enfin, Bagdad considérerait comme une « ligne rouge » absolue « l’instauration d’un califat » en Syrie qui deviendrait « une plateforme pour le terrorisme » à ses portes.
Une neutralité encore teintée d’ambiguïté
Malgré la fermeté affichée par Moqtada Sadr, la position irakienne reste entourée d’une certaine ambiguïté. Preuve en est, les déclarations d’un responsable d’une influente faction armée irakienne pro-iranienne qui affirme que pour l’heure, aucune décision d’intervenir en Syrie « n’a été prise ». Des propos qui laissent planer le doute sur un éventuel revirement de Bagdad si ses « lignes rouges » venaient à être franchies.
Une chose est sûre, le conflit syrien et ses répercussions régionales continueront de faire l’objet d’une attention particulière de la part des autorités irakiennes. Et ce, même si pour l’instant, l’option privilégiée par Bagdad semble être celle de la retenue et de la non-ingérence. Un fragile statu quo que l’évolution de la situation sur le terrain et les pressions des différents acteurs pourraient à tout moment faire voler en éclats.