C’est un sommet aux enjeux considérables qui se tient actuellement à Montevideo. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a fait le déplacement pour tenter de finaliser l’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et les pays du Mercosur. Un partenariat commercial et d’investissement d’une ampleur inédite, en négociation depuis plus de 20 ans, et qui semble enfin à portée de main malgré les vives oppositions qu’il suscite.
L’opposition française, principal obstacle
Si une large majorité des États membres de l’UE, emmenés par l’Allemagne et l’Espagne, poussent pour une conclusion rapide de l’accord, la France demeure le principal opposant. Emmanuel Macron estime que le texte n’est pas acceptable en l’état, pointant du doigt son impact potentiellement néfaste sur l’environnement et les agriculteurs européens.
L’accord n’est pas acceptable « en l’état ». Outre le respect des Accords de Paris sur le climat, il faut protéger les agriculteurs européens déjà en difficulté.
Emmanuel Macron, Président de la République française
La Pologne a emboîté le pas à la France, le Premier ministre Donald Tusk affirmant qu’il n’accepterait pas le projet « sous cette forme ». Mais Paris parviendra-t-il à rallier suffisamment d’alliés pour freiner une nouvelle fois cet accord, au moment où la France semble affaiblie politiquement ?
Le Brésil met la pression sur la France
Le président brésilien Lula, fervent défenseur de l’accord, a clairement fait savoir que si les Français s’y opposaient, ils ne décideraient plus de rien, la Commission européenne étant seule aux manettes. Un coup de pression supplémentaire sur Paris.
En vertu des traités européens, c’est en effet la Commission qui négocie les accords commerciaux au nom des Vingt-Sept. Mais une fois le texte signé, il devra être ratifié en obtenant l’approbation d’au moins 15 États membres représentant 65% de la population de l’UE, puis une majorité au Parlement européen. Un processus ardu qui pourrait s’avérer fatal à l’accord.
Des inquiétudes environnementales et agricoles
De nombreuses ONG et militants de gauche redoutent qu’un tel accord de libre-échange n’accélère la déforestation en Amazonie et n’aggrave la crise climatique en augmentant les émissions de gaz à effet de serre. Greenpeace qualifie le texte de « désastreux » pour l’environnement.
Côté agricole, la crainte est de voir déferler des produits sud-américains comme la viande, le sucre ou le soja, mettant en péril les producteurs européens déjà fragilisés. Le ministre italien de l’Agriculture a ainsi rejeté le projet, exigeant que les agriculteurs des deux continents soient soumis aux mêmes obligations.
Des enjeux géopolitiques et économiques majeurs
Pour les partisans de l’accord, il en va de la place de l’Europe sur l’échiquier mondial. Face à la montée en puissance de la Chine et au retour annoncé du protectionnisme américain avec Donald Trump, l’UE doit sécuriser de nouveaux débouchés pour ses entreprises.
Cet accord permettrait à l’UE, déjà premier partenaire commercial du Mercosur, d’exporter plus facilement ses voitures, machines et produits pharmaceutiques. En retour, les pays sud-américains pourraient écouler plus aisément leurs produits agricoles vers le Vieux Continent.
L’issue du sommet de Montevideo très incertaine
Malgré les espoirs d’Ursula von der Leyen de franchir enfin la ligne d’arrivée, l’issue des négociations apparaît encore très incertaine. Si un accord venait à être trouvé, il devra encore surmonter l’obstacle de la ratification, loin d’être acquise.
La France pourra-t-elle convaincre suffisamment d’alliés de la suivre dans son opposition ? L’Italie, l’Autriche et les Pays-Bas ont déjà exprimé leurs réticences. En s’alliant avec la Pologne et ces pays, Paris pourrait atteindre les 35% de la population européenne nécessaires pour bloquer l’adoption de l’accord.
Mais la pression des autres États membres et de la Commission est forte pour aller de l’avant malgré tout. Les prochains jours s’annoncent décisifs pour l’avenir des relations commerciales entre l’Europe et l’Amérique latine, avec des conséquences majeures des deux côtés de l’Atlantique.