La ville d’Alep, deuxième plus grande cité de Syrie, est à nouveau au cœur de l’actualité internationale. En l’espace de seulement quatre jours, les rebelles islamistes du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS) ont réussi à prendre le contrôle de cette métropole stratégique, infligeant un revers cinglant aux forces loyales au président Bachar al-Assad. Une offensive éclair qui marque un tournant majeur dans ce conflit vieux de plus de dix ans.
L’irrésistible avancée des rebelles vers le sud
Depuis leur fief d’Idlib dans le nord-ouest du pays, les combattants de HTS ont lancé le 27 novembre dernier une vaste offensive en direction du sud. Profitant de l’affaiblissement et de la dispersion des troupes gouvernementales, notamment accaparées par la guerre contre Israël au Liban, les djihadistes ont rapidement progressé, s’emparant de larges portions de territoire.
Leur objectif principal : la ville d’Alep, véritable joyau que se disputent le régime et les rebelles depuis 2012. Malgré une résistance initiale, l’armée syrienne a dû battre en retraite, abandonnant le contrôle de la cité aux mains des assaillants en à peine 96 heures. Un coup dur pour Damas.
Hama, prochaine étape des insurgés ?
Galvanisés par leur succès, les rebelles ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Selon des sources proches de HTS, leurs forces seraient déjà en route vers Hama, quatrième ville du pays située à 180km au sud d’Alep. Une position cruciale qui, si elle venait à tomber, menacerait directement les bastions du pouvoir à Damas et Lattaquié.
Le régime syrien a bien annoncé le lancement d’une contre-offensive pour reprendre le terrain perdu. Mais au vu du rapport de force actuel, nombreux sont les experts qui doutent de sa capacité à endiguer l’avancée rebelle. D’autant que dans l’est du pays, les combats semblent aussi s’intensifier entre les différentes factions kurdes, pro-turques et pro-Assad qui se disputent la région.
Un retour des hostilités sur fond de bouleversements régionaux
Cette spectaculaire percée des forces anti-Assad intervient dans un contexte géopolitique particulièrement tendu au Moyen-Orient. Entre la guerre ouverte entre Israël et le Hezbollah libanais, l’exode massif des réfugiés syriens fuyant les combats, et les récentes déclarations du président turc Erdogan tendant la main à son ennemi Bachar al-Assad, la situation n’a jamais semblé aussi complexe et instable dans la région.
La Syrie est redevenue l’épicentre de toutes les lignes de fracture qui traversent le Moyen-Orient
– Un diplomate européen
Alors que les grands acteurs régionaux et internationaux semblent plus divisés que jamais sur la marche à suivre, ce brutal regain de violence en Syrie pourrait bien redistribuer les cartes et rebattre complètement les alliances dans la région. Avec le risque d’entraîner une déflagration bien au-delà des frontières syriennes.
Un conflit sans fin, aux conséquences désastreuses
Plus de dix ans après le début des manifestations pacifiques réclamant des réformes démocratiques, rapidement noyées dans le sang par le régime, le conflit syrien semble donc reparti pour un nouveau cycle de violences. Un enlisement dramatique pour les populations civiles, prises en étau entre les différents belligérants.
Un bilan humain et matériel terrifiant, des villes entières rayées de la carte, plus de 13 millions de déplacés et de réfugiés… La Syrie, autrefois baptisée le « berceau des civilisations », n’est plus aujourd’hui qu’un champ de ruines à perte de vue, où s’affrontent jusqu’à l’absurde les ambitions rivales des uns et des autres.
Mais derrière ces considérations stratégiques et ces jeux de puissance, n’oublions pas que ce sont des vies, des familles, des destins individuels qui se jouent. Comment reconstruire une société, une économie, un avenir, dans un pays dévasté par des années de guerre fratricide ? 11 ans après le début du soulèvement, cette question reste plus que jamais sans réponse.