Alors que le vote crucial sur le budget de la Sécurité sociale doit avoir lieu cet après-midi à l’Assemblée nationale, le spectre d’une censure plane sur le gouvernement de Michel Barnier. Privé de majorité absolue, le premier ministre risque de voir son projet retoqué, déclenchant une crise politique majeure. Mais selon des sources proches de Matignon, une stratégie alternative pourrait permettre à l’exécutif d’échapper à ce scénario catastrophe.
L’hypothèse d’un renoncement tactique au 49.3
Acculé, Michel Barnier pourrait en effet choisir de ne pas engager la responsabilité de son gouvernement via l’article 49 alinéa 3 de la Constitution. Cette arme constitutionnelle, très controversée, permet de faire adopter un texte sans vote, sauf motion de censure. Son utilisation semble pourtant inévitable, le gouvernement ne disposant pas des voix nécessaires pour faire passer son budget.
Mais selon un conseiller ministériel, le premier ministre envisagerait sérieusement de ne pas dégainer le 49.3, laissant ainsi son projet être rejeté. Un scénario qui, en apparence, ressemble à un suicide politique. Pourtant, il pourrait s’agir d’un coup de poker audacieux pour éviter le pire.
Promulguer le budget par ordonnances
Car en cas de rejet, le gouvernement aurait alors les mains libres pour promulguer les principales mesures du budget par ordonnances, sans passer par le Parlement. « Il s’agirait de saucissonner le texte et d’en reprendre les dispositions essentielles via le 38 de la Constitution », confie un proche du dossier. Certes inédit et politiquement risqué, ce scénario permettrait néanmoins à Michel Barnier de sauver les meubles.
C’est un pari très osé, mais qui peut s’avérer payant sur le long terme. Mieux vaut une défaite temporaire qu’une censure qui signerait la fin de ce gouvernement.
Un conseiller de Matignon
Gagner du temps et préparer la suite
Cette manœuvre permettrait surtout à l’exécutif de gagner un temps précieux. En repoussant l’inévitable motion de censure de quelques semaines, Michel Barnier espère profiter de ce répit pour renouer le dialogue avec les oppositions et trouver un compromis. « L’objectif est d’éviter à tout prix de retourner devant les électeurs, le rapport de force n’étant pas favorable », souligne un député de la majorité.
Des tractations ont ainsi été lancées en coulisses avec certains élus Les Républicains et du groupe LIOT, pour tenter de constituer une majorité de circonstance. Des gages pourraient être donnés, notamment sur la réforme des retraites ou les baisses d’impôts. Quitte à édulcorer le projet initial du gouvernement.
Un scénario à haut risque
Reste que cette stratégie est loin de faire l’unanimité au sein même de la majorité. Nombreux sont ceux qui jugent le scénario bien trop périlleux et appellent le premier ministre à assumer un passage en force. « Si on perd la face sur ce budget, on sera définitivement affaiblis pour la suite du quinquennat », met en garde un pilier de la Macronie.
Michel Barnier joue donc son va-tout cet après-midi dans l’hémicycle. Soit il renonce au 49.3 et tente un coup de poker en promulguant le budget par ordonnances. Soit il engage sa responsabilité au risque de voir son gouvernement renversé. Dans les deux cas, l’incertitude domine et tous les scénarios restent ouverts. Une seule certitude : les prochaines heures s’annoncent décisives pour la survie de l’exécutif.