Un vent de changement souffle sur l’Islande. Alors que le pays fait face à une inflation persistante et des taux d’intérêt élevés, les élections législatives anticipées de ce dimanche réservent leur lot de surprises. Selon les résultats partiels, les sociaux-démocrates semblent en passe de bouleverser l’échiquier politique islandais. Mais quelles pourraient être les conséquences de ce séisme électoral ?
Pouvoir d’achat et logement au cœur des préoccupations
D’après les sondages réalisés à la sortie des urnes, les 268 000 électeurs islandais ont placé les questions de pouvoir d’achat, de logement et de santé au premier plan de leurs préoccupations. Dans un contexte économique tendu, marqué par une inflation galopante et des taux d’intérêt qui grimpent en flèche, les Islandais attendent de leurs dirigeants des réponses concrètes pour améliorer leur quotidien.
L’avancée surprise des sociaux-démocrates
La véritable surprise de ce scrutin vient de la percée inattendue de l’Alliance sociale-démocrate. Menée par Kristrun Frostadottir, la formation de centre-gauche caracole en tête avec 21,2% des suffrages, selon les résultats partiels portant sur plus d’un tiers des bulletins dépouillés. Un score qui, s’il se confirme, permettrait aux sociaux-démocrates de plus que doubler leur résultat par rapport aux élections de 2021.
Il y aura des changements dans la gouvernance du pays. C’est clair.
Kristrun Frostadottir, cheffe de l’Alliance sociale-démocrate
Le parti du Premier ministre en difficulté
En face, le parti de l’Indépendance du Premier ministre Bjarni Benediktsson semble marquer le pas. La formation conservatrice, qui domine traditionnellement la vie politique islandaise, ne recueillerait pour l’instant que 19,9% des voix. Un score en net recul par rapport au scrutin précédent, qui témoigne d’une certaine lassitude des électeurs face aux crises à répétition secouant le gouvernement de coalition.
Vers une coalition sociale-démocrate/libérale ?
Si ces résultats se confirment, l’Islande pourrait s’orienter vers une coalition inédite entre les sociaux-démocrates de Kristrun Frostadottir et les libéraux du parti de la Réforme, crédités de 16% des suffrages. Selon des experts contactés par notre rédaction, cette alliance « rose-orange » constituerait un attelage cohérent sur le plan des politiques économiques et sociales.
Une coalition entre sociaux-démocrates et libéraux est une hypothèse crédible au vu des résultats. Leurs programmes présentent de nombreuses convergences.
Olafur Hardarson, professeur de sciences politiques à l’université d’Islande
L’immigration, un enjeu secondaire
Fait marquant de cette élection : la question de l’immigration, pourtant à l’origine de la chute du gouvernement, n’a pas constitué un enjeu central pour la plupart des électeurs. Seuls 32% des Islandais interrogés ont cité ce thème parmi leurs cinq préoccupations principales. Un signe que les questions de pouvoir d’achat et de protection sociale restent prioritaires dans un pays où un habitant sur cinq est né à l’étranger.
Une instabilité politique chronique
Quoi qu’il en soit, ces élections confirment la grande volatilité du paysage politique islandais depuis la crise financière de 2008. Comme le souligne Eirikur Bergmann, professeur de politique à l’université de Bifrost, les Islandais se montrent « extrêmement critiques à l’égard de leurs gouvernements » et n’hésitent pas à sanctionner les partis au pouvoir lors de chaque scrutin. Une tendance lourde qui complique la mise en place de politiques stables et de long terme.
Vers quelle direction s’orientera l’Islande au lendemain de ces élections législatives anticipées ? Réponse dans les prochains jours, lorsque l’ensemble des bulletins auront été dépouillés et les discussions en vue de la formation d’une nouvelle coalition auront abouti. Une chose est sûre : le raz-de-marée social-démocrate qui se profile pourrait bien redistribuer les cartes de la politique islandaise pour les années à venir.