C’est un séisme qui ébranle le secteur de la petite enfance. Les crèches People & Baby, fleuron des structures privées de garde d’enfants, sont au cœur d’un scandale retentissant. Enquête sur les dérives d’un groupe en perdition, rongé par les dettes et les mauvaises pratiques, qui laisse présager un avenir sombre pour les milliers de familles qui lui confient leurs bambins.
Un empire bâti sur du sable
Tout commence par une success story. Celle de Christophe Durieux, créateur charismatique et controversé des crèches People & Baby. Cet ancien infirmier se lance dans l’aventure en 2004, avec une promesse : révolutionner la garde d’enfants grâce à un concept novateur. Le succès est fulgurant. En quelques années, People & Baby devient le premier réseau de crèches privées en France, avec plus de 600 établissements.
Mais derrière la vitrine clinquante se cache une réalité bien plus sombre. Selon des sources proches du dossier, le groupe croule sous une dette abyssale, estimée à plusieurs dizaines de millions d’euros. Un gouffre financier creusé par les projets pharaoniques et la gestion hasardeuse de son dirigeant. Pénuries de matériel, locaux insalubres, personnel sous-qualifié… Les témoignages sur les conditions déplorables d’accueil des enfants affluent.
C’était l’angoisse permanente de ne pas avoir assez de couches, de lait, de jouets. On jonglait constamment avec le manque de moyens.
Une ex-salariée de People & Baby
La chute d’un géant aux pieds d’argile
Face au scandale, Christophe Durieux a été débarqué en avril dernier de la direction du groupe. Mais le mal semble profond. Selon nos informations, People & Baby a été placé en procédure de sauvegarde et risque de passer sous le contrôle de ses créanciers. Un séisme pour les 30 000 enfants accueillis et leurs parents, qui craignent des fermetures en cascade.
Au-delà de People & Baby, c’est tout le système des crèches privées qui est pointé du doigt. Dans son livre-enquête Les Ogres, le journaliste Victor Castanet dénonce un modèle qui fait primer la rentabilité sur le bien-être des enfants. Course aux marges, personnel sous pression, pratiques douteuses… Les révélations s’accumulent et ternissent l’image d’un secteur en plein boom, dopé par les besoins croissants de garde.
L’heure des comptes et du sursaut
Pour les pouvoirs publics, l’heure est à la réaction. Le gouvernement promet un plan d’action pour renforcer les contrôles sur les crèches privées et revoir leur modèle économique. Des annonces très attendues par les professionnels du secteur, qui tirent depuis longtemps la sonnette d’alarme sur les dérives.
Il faut redonner du sens et de l’éthique à l’accueil de la petite enfance. Nos enfants ne sont pas une marchandise.
Marie-Laure, éducatrice de jeunes enfants
Car au-delà du cas People & Baby, c’est bien la question de la marchandisation de la petite enfance qui est posée. Dans une société qui externalise toujours plus la garde des tout-petits, la quête effrénée de profits peut-elle se faire au détriment de leur épanouissement ? Le scandale qui secoue les crèches privées a le mérite de remettre ce débat crucial sur le devant de la scène. Et d’appeler à un sursaut collectif pour bâtir un système tourné vers l’intérêt supérieur de l’enfant.
Une refondation nécessaire pour redonner confiance aux parents et offrir aux bambins les meilleures conditions d’accueil. Car derrière chaque place en crèche, ce sont les prémices d’une vie qui se jouent. Des débuts dans l’existence qui ne devraient souffrir d’aucun compromis. Le scandale People & Baby nous le rappelle douloureusement.
