Au Pakistan, les violences entre communautés sunnites et chiites ont pris un tour dramatique ces derniers jours. Selon un responsable local s’exprimant sous couvert d’anonymat, les affrontements dans le district de Kourram, au nord-ouest du pays, ont fait 13 morts supplémentaires en seulement 48 heures. Un lourd bilan qui porte à 124 le nombre de personnes tuées en à peine dix jours de conflit.
D’après cette source gouvernementale, le climat de défiance entre les deux camps est tel qu’aucune des tribus impliquées ne semble disposée à respecter les appels au cessez-le-feu. Plus de 50 blessés sont également à déplorer tandis que les combats se poursuivaient encore ce samedi matin.
Un cycle de représailles sanglantes
Si le Pakistan compte une large majorité de musulmans sunnites, le district de Kourram, frontalier de l’Afghanistan, abrite une importante communauté chiite. C’est le ciblage de cette dernière qui a mis le feu aux poudres il y a un peu plus d’une semaine. Des assaillants ont ouvert le feu sur deux convois de familles chiites pourtant escortés par la police, faisant plus de 40 victimes dont des enfants.
En réaction, des groupes armés chiites ont lancé des raids contre des villages sunnites, incendiant des centaines d’habitations et de commerces. Une violence qui n’a pas tardé à susciter une contre-offensive de la part des sunnites, déclenchant un engrenage qui perdure depuis maintenant dix jours. Un mode opératoire tristement rodé dans cette région où les tribus règlent leurs différends par les armes depuis des décennies.
L’échec des tentatives de trêve
Face à cette situation explosive, les autorités locales ont bien tenté d’imposer des trêves. Une première, d’une durée de sept jours, avait été annoncée dimanche dernier avant d’être presque immédiatement rompue dès le lendemain. Une seconde, conclue mercredi pour dix jours cette fois, n’aura pas connu un sort plus heureux. Rien ne semble donc en mesure d’apaiser les tensions entre les deux communautés.
La peur gagne la population
Pris au piège de cette spirale meurtrière, de nombreux habitants du district de Kourram cherchent désormais à fuir. Mais comme le souligne le responsable gouvernemental local, la dégradation des conditions sécuritaires rend tout déplacement périlleux. Une crainte de voir le bilan humain s’alourdir encore est clairement perceptible.
L’impuissance des forces de l’ordre
Du côté des autorités régionales, c’est un certain sentiment d’impuissance qui semble dominer. Un officiel de Peshawar, la capitale de la province du Khyber-Pakhtunkhwa, a ainsi déploré qu’aucune des mesures entreprises par le gouvernement local n’ait pu être mise en œuvre efficacement pour ramener la paix. Il faut dire que la police peine traditionnellement à s’imposer dans cette zone anciennement semi-autonome, intégrée politiquement seulement en 2018.
Un conflit ancien ravivé par les tensions territoriales
Si l’appartenance religieuse oppose sunnites et chiites de longue date dans le district de Kourram, leurs relations sont régulièrement exacerbées par des différends territoriaux. Dans cette région montagneuse au relief accidenté, le contrôle des terres est un enjeu majeur qui attise les rivalités. Un facteur supplémentaire de tensions dans une zone déjà fortement fragilisée.
Alors que la spirale de la violence ne montre aucun signe d’essoufflement, c’est toute une population qui se retrouve otage de ce conflit. Une situation humanitaire préoccupante qui met une fois de plus en lumière les profondes fractures communautaires qui minent le Pakistan. Face à l’impuissance des autorités, l’espoir d’un retour au calme semble plus que jamais fragile. Une nouvelle illustration des défis immenses qui continuent de se poser au pays dans sa quête d’une stabilité durable.