Les rues de Reims ont été le théâtre d’une série d’agressions d’une rare violence ces derniers jours, impliquant de très jeunes individus. Récit d’une escalade qui a mené un mineur en détention provisoire.
Un guet-apens ultra-violent dans le tramway
Lundi 21 novembre, il est 18h lorsqu’un adolescent de 17 ans est pris pour cible dans une rame du tramway rémois. Roué de coups de marteau, il est grièvement blessé au visage et au crâne. Son pronostic vital n’est pas engagé mais les séquelles pourraient être irréversibles.
D’après une source proche de l’enquête, l’agression aurait été soigneusement préméditée. « La victime a été attirée dans un guet-apens. Ses agresseurs l’attendaient de pied ferme, armés et déterminés à en découdre », confie cette source sous couvert d’anonymat.
Représailles sanglantes devant un lycée
Le lendemain, la tension est à son comble. Aux abords d’un lycée de la ville, quatre jeunes s’apprêtent à régler leurs comptes. Pour éviter l’affrontement, ils se réfugient dans un VTC avec deux autres camarades. Peine perdue. Avant même que le véhicule ne démarre, un individu surgit et poignarde à deux reprises l’un des passagers de 17 ans. Transféré à l’hôpital dans un état critique, il est aujourd’hui hors de danger.
Il s’agissait clairement d’une expédition punitive en réponse à ce qui s’était passé la veille dans le tram. Dans ce genre d’affaires, c’est souvent l’engrenage de la violence, chaque camp voulant laver l’affront.
Un enquêteur
Six mineurs interpellés et déférés
L’enquête progresse rapidement. Les 27 et 28 novembre, six suspects âgés de 16 et 17 ans sont interpellés. Parmi eux, la victime du coup de couteau qui s’avère être l’auteur présumé de la violente agression dans le tramway. Présenté à un juge d’instruction, il est mis en examen pour tentative de meurtre et écroué.
Ses cinq comparses sont quant à eux poursuivis pour violences aggravées. À l’issue de leur garde à vue, ils ont été déférés devant un juge des enfants en vue d’une mise en examen.
Rivalités territoriales exacerbées par les réseaux sociaux
Pour les enquêteurs, le mobile de ces déchaînements de violence ne fait guère de doute. Ils seraient le fruit de l’animosité grandissante entre bandes de quartiers rivaux. Une situation attisée par l’usage immodéré des réseaux sociaux où s’échangent provocations et invectives.
C’est un phénomène qu’on observe de plus en plus. Les réseaux permettent à ces jeunes de s’invectiver à distance, d’attiser les tensions. Ça part souvent de futilités, un mauvais regard, une remarque mal interprétée. Mais l’emballement est rapide et les conséquences peuvent être dramatiques.
Un policier
Les protagonistes de ces rixes n’avaient a priori aucun antécédent judiciaire. Des ados lambda pris dans une spirale qui les dépasse. « On a vraiment l’impression que pour certains, la violence est devenue la norme, la seule façon de régler les conflits. C’est une dérive très inquiétante », s’alarme un éducateur.
La ville sous le choc
À Reims, c’est la consternation. Ces événements ravivent le souvenir d’autres affrontements qui avaient déjà endeuillé la ville par le passé. En 2020, un jeune homme de 19 ans avait été tué lors d’une rixe opposant une quarantaine d’individus armés de battes de baseball et de barres de fer.
Face à l’émotion suscitée, la mairie promet un renforcement de la sécurité et un plan d’action pour occuper les jeunes. Mais beaucoup s’interrogent sur les raisons profondes de ce déferlement de violence. Perte de repères, manque de perspectives, effets pervers des réseaux sociaux… Les causes sont multiples et les solutions loin d’être évidentes.
Une chose est sûre : à l’heure où ces lignes sont écrites, le climat reste tendu dans certains quartiers de Reims. Et chacun redoute qu’un nouvel épisode ne vienne alarmer une ville qui peine à cicatriser.
