Alors que les menaces de Donald Trump de taxer lourdement les produits canadiens dès son retour au pouvoir en janvier prochain résonnent comme un coup de tonnerre, le Canada semble déterminé à riposter. Selon une source gouvernementale s’exprimant sous couvert d’anonymat, Ottawa envisage sérieusement d’imposer à son tour des droits de douane supplémentaires sur une sélection de produits américains. Un travail d’identification des cibles potentielles serait d’ores et déjà en cours. Le spectre d’une nouvelle escalade dans les tensions commerciales entre les deux voisins se profile à l’horizon.
Trudeau prend la menace au sérieux
Loin de considérer l’annonce fracassante de l’ancien et probable futur locataire de la Maison Blanche comme une simple posture, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a tenu à clarifier les choses vendredi devant la presse :
Lorsque Donald Trump fait de telles déclarations, il a l’intention de les mettre à exécution. Cela ne fait aucun doute.
Des propos qui tranchent avec l’analyse de certains observateurs qui voient dans la sortie de Donald Trump une manœuvre de négociation. Pour Justin Trudeau, le retour annoncé de droits de douane de 25% sur les importations canadiennes est une perspective on ne peut plus concrète et lourde de conséquences.
L’épine dans le pied de Trudeau
Pour le dirigeant libéral, qui jouera sa réélection dans quelques mois, ce dossier tombe au plus mal. Largement devancé dans les sondages par le leader conservateur Pierre Poilievre, Justin Trudeau se serait bien passé de ce nouveau front. Son gouvernement se retrouve pris en tenaille entre la nécessité de défendre les intérêts économiques canadiens et la crainte d’attiser les braises d’une guerre commerciale.
L’importance du commerce avec les États-Unis
C’est peu dire que les exportations vers le marché américain sont vitales pour l’économie canadienne. En 2023, plus des trois quarts des ventes canadiennes à l’étranger (592 milliards de dollars canadiens, soit 400 milliards d’euros) ont eu pour destination les États-Unis. Sur le plan de l’emploi, près de 2 millions de travailleurs canadiens sur une population de 41 millions d’habitants dépendent directement des exportations.
Un jeu perdant-perdant
Face à ce mur de chiffres, Justin Trudeau a pris soin vendredi d’insister sur le fait que des droits de douane de 25% sur les importations canadiennes porteraient préjudice non seulement aux entreprises et aux ménages canadiens, mais aussi aux consommateurs et à l’économie américains. Une manière de souligner qu’une telle mesure s’apparenterait à un jeu perdant-perdant.
Précédents et risques
Ce scénario de surenchère n’est pas sans rappeler la séquence de 2018, lors du premier mandat de Donald Trump, lorsque Washington avait imposé des droits de douane de 25% sur l’acier et de 10% sur l’aluminium canadiens. Ottawa avait alors répliqué en ciblant à son tour une série de produits américains. Le risque d’assister à une répétition de ce bras de fer, en pire, est aujourd’hui réel.
Solutions et perspectives
À quelques mois de l’élection présidentielle américaine et de la probable candidature de Donald Trump, une issue rapide et pacifique apparaît peu probable. Le Canada dispose certes de leviers, que ce soit en actionnant les mécanismes de règlement des différends prévus par l’accord de libre-échange Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) ou en appelant à la raison et à la retenue. Mais trouver le juste équilibre entre fermeté et apaisement s’annonce périlleux dans le climat actuel. Il faudra à Justin Trudeau et à son équipe une grande finesse diplomatique pour dénouer ce dossier sans mettre en péril le précieux commerce canado-américain.