En Roumanie, le nouveau dépouillement des bulletins de l’élection présidentielle déclenche une vive polémique. Alors que plane le spectre d’une annulation du scrutin, les autorités pointent du doigt l’influence de la Russie et le rôle des réseaux sociaux comme TikTok dans ces irrégularités présumées.
C’est dans ce climat de tensions que les partis politiques se préparent aux élections législatives de dimanche, avec une extrême droite bien décidée à enfoncer le clou après son score surprise à la présidentielle. Un résultat qui inquiète les Occidentaux, craignant un changement d’orientation stratégique de ce pays membre de l’UE et de l’OTAN, situé aux portes de l’Ukraine en guerre.
Un recomptage qui passe mal
Partout dans le pays, d’imposants sacs remplis de bulletins de vote ont été acheminés vers les bureaux électoraux en vue d’un recomptage qui pourrait prendre jusqu’à trois jours, à huis clos. Une décision de la Cour constitutionnelle faisant suite à une requête en annulation déposée par un candidat défait, et qui suscite une levée de boucliers.
Le parti de centre-droit USR, dont la cheffe de file Elena Lasconi est arrivée sur les talons du vainqueur, a ainsi introduit un recours. De leur côté, les libéraux ont fustigé un arrêt « déroutant ne faisant qu’alimenter les craintes et les tensions ». Des doutes sur la transparence du processus sont également apparus, l’accès ayant été refusé à des observateurs indépendants.
La piste russe
Le Conseil suprême de la défense nationale affirme que Calin Georgescu, candidat d’extrême droite arrivé en tête de manière inattendue, a bénéficié d’un « traitement préférentiel » de la part de TikTok. Ce que le réseau social chinois a « catégoriquement » nié. Il est aussi question de « cyberattaques » visant à « influencer la régularité du processus électoral », avec « un intérêt croissant » de la Russie « dans le contexte sécuritaire régional actuel », selon les autorités.
Une extrême droite conquérante
Surfant sur ces polémiques, l’extrême droite roumaine espère transformer l’essai dimanche aux législatives. Les sondages lui prédisent plus de 30% des intentions de vote, du jamais vu dans un pays jusqu’ici épargné par les poussées nationalistes à l’œuvre dans la région. Plusieurs partis se disputent cet électorat, à l’instar de l’Alliance pour l’unité des Roumains (AUR) de George Simion, qui a récolté près de 14% à la présidentielle, ou encore SOS Romania de Diana Sosoaca, ouvertement pro-Kremlin.
Nous sommes là, debout, vivants, plus nombreux que jamais avec une formidable occasion devant nous.
George Simion, leader de l’AUR
Face à cette vague brune, le camp pro-européen évoque « une bataille existentielle » entre ceux voulant « préserver la jeune démocratie roumaine née en 1989 » et ceux souhaitant « revenir dans la sphère d’influence russe ». Laminés, les partis traditionnels jouent la carte de « l’expérience » pour limiter la casse, à l’image des sociaux-démocrates et libéraux au pouvoir.
Selon les analystes, toutes les cartes sont rebattues en vue de la formation du futur gouvernement. Certains évoquent même la possibilité d’un exécutif d’union nationale pour faire face aux risques sécuritaires avec la guerre aux portes de la Roumanie. Une hypothèse qui en dit long sur l’inquiétude des milieux politiques face à une recomposition majeure et imprévisible du paysage politique national.