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Sénégal : vers la fermeture des bases militaires françaises

Le Sénégal veut fermer les bases militaires françaises sur son sol, incompatibles avec sa souveraineté. Le président Bassirou Diomaye Faye souhaite néanmoins un "partenariat rénové" avec la France, après la reconnaissance par Macron du "massacre" de Thiaroye en 1944...

Les relations entre la France et le Sénégal sont en train de connaître un tournant historique. Dans un entretien accordé à l’AFP, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a annoncé que les bases militaires françaises présentes sur le sol sénégalais allaient devoir fermer leurs portes. Une décision motivée par la volonté du Sénégal de réaffirmer pleinement sa souveraineté, près de 64 ans après son indépendance.

La souveraineté du Sénégal incompatible avec les bases françaises

Pour le président Faye, élu en mars dernier sur la promesse de restaurer la souveraineté de son pays, la présence de bases militaires françaises n’est plus acceptable :

« Le Sénégal est un pays indépendant, c’est un pays souverain et la souveraineté ne s’accommode pas de la présence de bases militaires dans un pays souverain »

– Bassirou Diomaye Faye, président du Sénégal

Il a toutefois tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas d’un acte de « rupture » avec la France, mais plutôt d’une volonté d’établir un « partenariat rénové » avec l’ancienne puissance coloniale et alliée historique. Un partenariat qui devra cependant être « dépouillé de cette présence militaire », a-t-il souligné.

Vers une mise à jour de la doctrine de coopération militaire

Le chef de l’État sénégalais a évoqué une prochaine mise à jour de la doctrine de la coopération militaire entre les deux pays. Cette actualisation « impose évidemment qu’il n’y ait plus de bases militaires de quelque pays que ce soit au Sénégal », mais impliquera aussi « d’autres évolutions » dans la coopération pour les pays souhaitant la maintenir avec Dakar.

M. Faye a cité en exemple les relations du Sénégal avec d’autres pays comme la Chine, aujourd’hui premier partenaire commercial, la Turquie, les États-Unis ou l’Arabie saoudite, notant qu’aucun de ces États ne dispose de base militaire en territoire sénégalais.

La reconnaissance du « massacre » de Thiaroye, « un grand pas »

Le président sénégalais a par ailleurs salué comme « un grand pas » la reconnaissance par son homologue français Emmanuel Macron, dans une lettre récemment envoyée, du « massacre » commis par les forces coloniales françaises contre des tirailleurs sénégalais le 1er décembre 1944 à Thiaroye, près de Dakar.

Un événement tragique sur lequel subsistent encore de nombreuses zones d’ombre et qui avait été qualifié en 2014 par l’ancien président François Hollande de « répression sanglante », mais pas de « massacre ». Pour M. Faye, « un partenariat rénové ne peut être rénové que dans la vérité et dans l’exhaustivité de la vérité ».

La France appelée à redéfinir son partenariat avec le Sénégal

Malgré sa volonté de voir les bases françaises quitter le pays, le président sénégalais a réaffirmé l’importance de la France comme partenaire, au regard des investissements, de la présence de sociétés et de citoyens français. Mais il a appelé les autorités françaises à « envisager d’avoir un partenariat dépouillé de cette présence militaire, mais qui soit un partenariat riche, un partenariat fécond, un partenariat privilégié et global ».

La France, qui a décidé ces derniers mois de réduire fortement sa présence militaire en Afrique, aurait prévu selon des sources proches de l’exécutif de ne conserver qu’une centaine de militaires au Sénégal, contre 350 jusqu’à présent. Un rapport remis cette semaine au président Macron sur la reconfiguration du dispositif français prône un partenariat « renouvelé » et « coconstruit ».

La décision annoncée par le Sénégal illustre la volonté croissante des pays africains de s’émanciper de l’influence de l’ancienne puissance coloniale et de diversifier leurs partenariats à l’international. Une tendance qui s’est accélérée ces dernières années, plusieurs pays du Sahel ayant rompu leurs liens avec Paris pour se tourner vers d’autres alliés comme la Russie. Le Sénégal entend pour sa part rester l’interlocuteur du plus grand nombre, tout en réaffirmant sa pleine souveraineté.

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