La remise des prix « Talents des cités » à l’Élysée ce lundi 27 novembre a été le théâtre d’une séquence pour le moins surprenante. Alors qu’il venait de recevoir une avalanche de compliments de la part de Delphine Ernotte, la présidente de France Télévisions, Emmanuel Macron a choisi ce moment pour évoquer la question sensible du voile islamique, porté par l’une des lauréates de la soirée.
Emmanuel Macron interpellé sur la laïcité
Selon une source proche du dossier, le chef de l’État aurait été interpellé par certains participants sur la présence d’une femme voilée parmi les personnalités récompensées ce soir-là au palais présidentiel. Une situation qui n’a pas manqué de faire réagir Emmanuel Macron, pourtant connu pour sa volonté de ne pas stigmatiser les musulmans.
Le président de la République aurait alors pris la parole pour rappeler les principes de la laïcité à la française, tout en se montrant ouvert au dialogue sur cette question clivante. Une intervention qui intervenait quelques minutes seulement après que Delphine Ernotte l’ait couvert d’éloges, saluant sa « vision », son « courage » et son « humanité ».
Malaise et incompréhension
D’après plusieurs témoins, les propos d’Emmanuel Macron sur le voile ont provoqué un certain malaise parmi l’assistance. « C’était assez gênant, surtout dans un tel contexte », confie un participant. « On sentait que le président était mal à l’aise, mais qu’il se sentait obligé de réagir d’une manière ou d’une autre. »
Du côté de l’Élysée, on assure que les déclarations présidentielles ont été « déformées » et « sorties de leur contexte ». Un proche conseiller indique qu’Emmanuel Macron a simplement voulu réaffirmer son attachement à la laïcité, sans pour autant stigmatiser qui que ce soit. Une ligne de crête sur laquelle le chef de l’État semble décidé à rester en équilibre, malgré les polémiques.
La laïcité, un sujet brûlant
Il faut dire que la question de la laïcité, et notamment de la place du voile islamique dans l’espace public, reste un sujet brûlant dans le débat politique français. Entre ceux qui y voient une atteinte aux valeurs républicaines et ceux qui défendent la liberté des musulmanes de porter le foulard, le fossé semble se creuser un peu plus chaque jour.
« La laïcité n’est pas une option, c’est une nécessité pour faire vivre ensemble dans notre pays des femmes et des hommes qui n’ont pas la même religion, ou pas de religion du tout. »
Emmanuel Macron, discours aux Mureaux, 2 octobre 2020
Face à ces tensions, Emmanuel Macron tente de tracer une ligne claire, entre fermeté sur les principes et main tendue vers la communauté musulmane. Un exercice d’équilibriste périlleux, comme l’a montré l’épisode de la remise des prix « Talents des cités ».
L’art de la flatterie selon Delphine Ernotte
Mais ce qui a également marqué les esprits lors de cette soirée, c’est l’intense séquence de flatterie à laquelle s’est livrée Delphine Ernotte envers le président de la République. Des propos dithyrambiques qui n’ont pas manqué de faire réagir, certains y voyant une forme de complaisance de la part de la patronne de l’audiovisuel public.
« Monsieur le Président, vous êtes un homme de courage, de vision et de cœur », aurait-elle déclaré selon des propos rapportés. « Votre détermination à réformer notre pays force l’admiration. » Des louanges appuyées qui ont fait tiquer jusqu’au sein de France Télévisions, où certains s’interrogent sur l’indépendance de leur présidente vis-à-vis du pouvoir.
Entre flatteries et sujets qui fâchent
Au final, cette remise de prix à l’Élysée aura été marquée par un curieux mélange des genres, entre flatteries appuyées et sujets politiques sensibles. Un cocktail détonnant qui en dit long sur les relations complexes entre le pouvoir et les médias, mais aussi sur la difficulté d’aborder sereinement la question de la laïcité dans le débat public.
Reste à savoir si cet incident aura des conséquences politiques pour Emmanuel Macron, à l’heure où son quinquennat entre dans sa dernière ligne droite. Une chose est sûre : sur la question du voile comme sur bien d’autres sujets clivants, le chef de l’État n’a pas fini de marcher sur des œufs.