Dans un rebondissement inattendu, un avocat de haut rang du futur ministère de la justice demande l’annulation pure et simple d’une lourde condamnation civile de Donald Trump « pour le plus grand bien du pays ». Cette requête qui intervient alors que l’ancien président vient de remporter l’élection promet de relancer le débat sur les limites de l’immunité présidentielle.
Une condamnation à 454 millions de dollars pour fraudes fiscales
En février dernier, Donald Trump avait été condamné avec ses enfants Donald Jr et Eric par un tribunal civil de New York à payer 454 millions de dollars de dommages et intérêts. Les Trump étaient reconnus coupables d’avoir gonflé frauduleusement la valeur de leurs actifs immobiliers, dont la Trump Tower, pour obtenir des prêts bancaires plus avantageux dans les années 2010.
La procureure de l’État de New York Letitia James, membre du parti démocrate, menaçait alors de procéder à des saisies immobilières pour recouvrer le montant de l’amende. Mais Donald Trump, en pleine campagne présidentielle, avait fait appel et déposé une caution de 175 millions de dollars fournie par un assureur.
Des « questions constitutionnelles douteuses » selon l’avocat de Trump
Mais dans un courrier de mardi, le futur numéro 4 du ministère de la justice John Sauer exige maintenant de Mme James qu’elle « abandonne complètement l’affaire » et « annule le jugement et tous les dommages et intérêts » pour le « plus grand bien du pays ». Si la condamnation n’est pas annulée, l’avocat brandit le risque de soulever de « graves et douteuses questions constitutionnelles ».
L’immunité présidentielle déjà élargie par la Cour suprême
John Sauer n’en est pas à son coup d’essai. Cet été, cet avocat conservateur avait réussi à convaincre la Cour suprême, où les juges nommés par Trump sont désormais majoritaires, d’élargir le champ de l’immunité présidentielle. Une décision qui protège un peu plus Trump pour les actes commis entre ses deux mandats.
Mettre « les divisions amères » de côté comme Lincoln ?
Pour justifier sa demande, Me Sauer en appelle à l’histoire des États-Unis et à l’exemple des présidents George Washington, Abraham Lincoln et John F. Kennedy qui ont œuvré à la réconciliation nationale. Il cite notamment le discours de Lincoln en 1863 qui exhortait les Américains à « mettre de côté leurs divisions amères » pour célébrer Thanksgiving « d’une seule voix ».
« Le 3 octobre 1863, Abraham Lincoln avait fait de Thanksgiving la fête nationale que nous célébrons en exhortant les Américains à mettre de côté leurs divisions amères et à bénir la liberté d’une seule voix et avec un coeur unique ».
John Sauer, futur numéro 4 du ministère de la justice
Une analogie historique osée pour ce dossier de fraudes fiscales. Mais M. Sauer estime qu’après « sa victoire électorale historique », l’heure est venue pour le président Trump d’appeler à « mettre fin aux conflits partisans et à ce que les factions rivales joignent leurs forces pour le plus grand bien du pays ».
Des poursuites fédérales abandonnées mais de nombreux dossiers en cours
Si la justice fédérale vient d’abandonner ses poursuites contre Donald Trump pour son ingérence présumée dans l’élection de 2020, l’ancien et futur président n’en a pas fini avec ses démêlés judiciaires. Entre l’affaire des archives de la Maison Blanche, les accusations d’agression sexuelle, et cette condamnation pour fraudes fiscales, les dossiers sensibles impliquant Trump à différents niveaux restent nombreux.
La demande d’annulation de sa condamnation par un haut responsable du futur ministère de la justice apparaît donc comme une tentative de faire table rase du passé au nom de l’intérêt supérieur du pays. Reste à savoir si cet argument sera entendu par la justice de l’État de New York et comment réagiront les démocrates face à ce qu’ils dénoncent comme une « présidentialisation » à marche forcée de Donald Trump.