Dans le nord d’Israël, après plus d’un an à se précipiter aux abris dès que les sirènes retentissent, les habitants savourent le calme retrouvé grâce à la trêve conclue avec le Hezbollah, le mouvement islamiste libanais. Pourtant, malgré ce cessez-le-feu, aussi fragile soit-il, la vie ne reprend que doucement son cours normal dans cette région.
Un retour progressif à la normalité
À Nahariya, ville côtière israélienne à portée de roquette du territoire libanais, les signes d’une normalité retrouvée se multiplient timidement. La plupart des boutiques ont rouvert leurs portes, les bus ont repris leurs trajets habituels et les passants se font plus nombreux dans les rues. Pourtant, des stigmates de cette guerre qui ne dit pas son nom persistent : les écoles demeurent fermées et la vigilance reste de mise.
Le soulagement des commerçants
Pour Baha Arafat, vendeur de shawarma, l’annonce de la trêve a été accueillie avec soulagement. « Je me sens beaucoup mieux maintenant que je sais qu’il y a un cessez-le-feu », confie cet homme de 44 ans, heureux de pouvoir à nouveau installer son stand. Il raconte les derniers jours tendus, où la proximité des tirs du Hezbollah et l’absence d’abri à proximité rendaient l’exercice de son activité particulièrement périlleux. « Moins de clients venaient et les sirènes incessantes gâchaient tout », déplore-t-il, espérant un retour durable de sa clientèle.
Entre espoirs de paix et méfiance persistante
Si le cessez-le-feu en vigueur depuis mardi est globalement bien accueilli, tous ne partagent pas le même enthousiasme quant à sa pérennité. Pour Nissim et Meir, deux amis septuagénaires, pas de quoi pavoiser. « C’est dommage, on aurait dû continuer pendant au moins deux mois pour finir le boulot », estime Nissim Ravivo, peu convaincu par cette trêve. « On ne se sent toujours pas en sécurité et ça ne nous plaît pas », renchérit son compère, pointant du doigt les dégâts provoqués par les roquettes du Hezbollah dans les communautés alentours et les pertes économiques engendrées.
Comment peut-on faire confiance en un ennemi qui a dit qu’il veut tous nous tuer ?
– Nes Kari, caviste à Nahariya
Cette méfiance envers le mouvement chiite libanais et ce cessez-le-feu en demi-teinte, Nes Kari, 25 ans, les partage. « N’allez pas croire qu’il va y avoir la paix », prévient cette jeune caviste, persuadée qu’il est illusoire d’accorder du crédit à un ennemi ayant juré la perte d’Israël.
L’espoir d’un retour à l’école
Pour Alana Sverdlov en revanche, cette accalmie est une divine surprise. Venue d’Ukraine il y a deux ans, cette mère de famille voit dans la trêve l’opportunité pour ses enfants de retrouver enfin les bancs de l’école, eux que les sirènes et les tirs ont tant éprouvé. « Ça a été stressant, en particulier pour mes enfants », témoigne la quinquagénaire, soulagée à l’idée que le quotidien de sa famille ne soit plus rythmé par ces appels à se mettre à l’abri.
Le défi des déplacés
Le chemin vers une normalité retrouvée risque toutefois d’être encore long pour les quelque 60 000 déplacés du nord d’Israël, chassés par les hostilités et qui attendent toujours de pouvoir regagner leur foyer. Un défi de taille pour les autorités israéliennes, qui devront aussi composer avec les stigmates laissés par cette énième escalade de violence avec leur voisin du nord.
Un cessez-le-feu en demi-teinte
Conclu sous l’égide des États-Unis après une intensification des raids aériens et des opérations terrestres israéliens au Liban pour repousser le Hezbollah, ce cessez-le-feu demeure fragile. Si l’accalmie est réelle sur le terrain, nombre d’Israéliens du nord doutent de sa longévité, échaudés par ce énième cycle de violences qui perdure depuis plus d’un an maintenant.
On aurait dû continuer pendant au moins deux mois pour finir le boulot.
– Nissim Ravivo, habitant de Nahariya
Le 8 octobre 2023, le mouvement chiite libanais avait ouvert les hostilités pour soutenir le Hamas palestinien dans sa guerre contre Israël autour de Gaza. Une escalade militaire qui aura duré près de 11 mois, ponctuée de raids israéliens au Liban et de salves de roquettes du Hezbollah sur le nord d’Israël, contraignant des dizaines de milliers d’habitants de la région à fuir ou à vivre au rythme des alertes et des courses aux abris.
Un répit précaire
Malgré ce cessez-le-feu en demi-teinte, la vie tente de reprendre ses droits dans le nord d’Israël. Les stigmates de ce nouveau round meurtrier avec le Hezbollah sont encore présents, mais les habitants s’efforcent de renouer avec une certaine normalité, aussi précaire soit-elle. Entre méfiance et espoir, réalisme et volonté d’aller de l’avant, ils réapprennent doucement à vivre sans la menace permanente des roquettes. Un répit sur fond d’incertitude, à la merci de la fragile trêve en vigueur et d’un équilibre géopolitique régional toujours instable.