Alors que les bombes pleuvent encore sur le pays du Cèdre, l’annonce d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah est accueillie avec un soulagement teinté d’incertitude par la population libanaise éreintée. Derrière la fumée des explosions et les décombres, se dessinent les contours d’une situation géopolitique explosive dont les enjeux dépassent largement les frontières du Liban.
Un cessez-le-feu précaire sur fond de destructions massives
Malgré l’approbation par le cabinet de sécurité israélien d’un accord de trêve, les frappes se sont poursuivies sur Beyrouth et d’autres régions du Liban, semant la panique parmi les civils. D’après des sources proches du dossier, le cessez-le-feu doit entrer en vigueur mercredi à 4 heures du matin, laissant planer le doute sur la réelle volonté des belligérants de déposer les armes.
Le bilan humain provisoire fait état de 3823 morts dont plus de 200 enfants et près de 16 000 blessés. Les dégâts matériels sont évalués à plus d’un tiers du PIB libanais et près d’1,5 million de personnes ont été déplacées, jetées sur les routes de l’exode par les bombardements.
Un accord en 13 points pour clarifier la résolution 1701 de l’ONU
L’accord de cessez-le-feu, négocié par le président du Parlement libanais Nabih Berri, vise à clarifier la mise en œuvre de la résolution 1701 adoptée après la guerre de 2006. Il prévoit le retrait israélien du Liban sous 60 jours et le repli des combattants du Hezbollah au nord du fleuve Litani. L’armée libanaise sera chargée de sécuriser le Sud, avec le démantèlement des infrastructures du parti chiite.
Mais les modalités concrètes de supervision restent floues, Israël et le Liban contestant la composition du comité de contrôle. La perspective d’un accord sur leur frontière terrestre, après celui sur la frontière maritime conclu en octobre 2022, paraît encore lointaine au vu des velléités guerrières persistantes.
Le Hezbollah, acteur incontournable du conflit
Bras armé de l’Iran implanté dans le Sud-Liban et la banlieue de Beyrouth, le Hezbollah est au cœur de ce nouveau cycle de violences. Son soutien actif aux militants palestiniens de Gaza a provoqué une réaction en chaîne, entraînant le Liban dans une spirale de destructions sans précédent depuis 2006.
Il est temps d’engager une discussion sérieuse et calme sur la décision du Hezbollah de lancer sa guerre en soutien à Gaza et le lourd tribut payé par le peuple libanais.
Randa Slim, Middle East Institute
Mohammad Raad, chef du groupe parlementaire du Hezbollah, maintient que la « résistance » reste un pilier de la défense du Liban. Une position qui fait débat au sein d’une société libanaise polarisée entre partisans et opposants du parti chiite.
Les défis politiques et économiques de l’après-guerre
Au-delà de l’urgence humanitaire, le Liban devra très vite se pencher sur son avenir politique et la reconstruction du pays. Avec des infrastructures dévastées et une économie exsangue, lourdement impactée par une crise financière préexistante, les défis s’annoncent titanesques.
Sur le plan intérieur, l’épreuve de la guerre risque d’attiser les tensions communautaires et d’aggraver la fracture entre pro et anti-Hezbollah. L’unité nationale et la stabilité du pays sont plus que jamais menacées, sur fond de paupérisation accélérée de la population.
Quant au volet géopolitique, le Liban se retrouve une nouvelle fois l’otage des puissances régionales et du bras de fer entre l’Iran et Israël. Washington et Téhéran, parrain du Hezbollah, auront un rôle majeur à jouer pour consolider ce cessez-le-feu et enclencher une vraie dynamique de paix.
Une paix durable est-elle possible ?
Si l’heure est au soulagement côté libanais, l’accalmie reste précaire au regard des contentieux profonds qui minent les relations israélo-libanaises. Sans un règlement politique global intégrant les questions sécuritaires, frontalières et la place du Hezbollah, le spectre d’une nouvelle escalade militaire continuera de planer.
Les dommages infligés au Liban sont immenses et sa souveraineté gravement entamée. La communauté internationale a une responsabilité morale d’accompagner le pays des Cèdres vers une paix et une stabilité durables. Un chemin pavé d’embûches, où chaque pas vers la réconciliation demandera des trésors de sagesse politique et diplomatique.