C’est un exploit qui redore le blason de la diplomatie française. Après des semaines d’intenses négociations menées de concert avec les États-Unis, le président Emmanuel Macron vient de remporter une victoire diplomatique majeure au Proche-Orient avec l’annonce d’un cessez-le-feu au Liban. Un succès inespéré qui intervient à point nommé, quelques jours seulement avant une visite d’État prévue en Arabie saoudite.
Le retour en force de la France au Proche-Orient
Pour les experts, cette trêve marque un retour en grâce spectaculaire de la diplomatie française dans une région où son influence s’était érodée ces dernières années. « Le Liban réhabilite le rôle de la France au Proche-Orient », analyse un spécialiste du monde arabe. Un constat partagé par de nombreux observateurs qui saluent « un succès » pour Paris, après l’échec cuisant de septembre dernier où une initiative similaire avait été torpillée au dernier moment par Israël.
Macron et Biden, un tandem efficace
Selon des sources proches du dossier, Emmanuel Macron, très investi personnellement, est resté activement engagé dans les négociations aux côtés des Américains. Et ce malgré les réticences israéliennes, le Premier ministre Benjamin Netanyahu étant connu pour ses relations tendues avec le président français. Un engagement payant, salué par Joe Biden lui-même qui a tenu à remercier son homologue pour « son partenariat » dans ce dossier sensible, entre Israël et le Hezbollah libanais.
La France, un interlocuteur indispensable
D’après plusieurs sources concordantes, Américains et Libanais ont d’ailleurs insisté pour que Paris reste dans le jeu, en raison notamment de ses contacts privilégiés avec le mouvement chiite libanais et son allié iranien. « Les Américains avaient besoin de nous pour le Hezbollah », confie un diplomate français. Une « plus-value » hexagonale traditionnelle qui a permis à la France de retrouver sa « place » entre les différents acteurs de la région.
Un succès bienvenu pour Macron
Pour Emmanuel Macron, en difficulté sur le plan intérieur depuis l’échec de la dissolution de l’Assemblée nationale en juin, cette victoire diplomatique tombe à pic. Elle lui offre une bouffée d’oxygène sur la scène internationale, où ses efforts, de la Libye à l’Ukraine, n’ont jusqu’ici guère été couronnés de succès, lui attirant même de vives critiques pour son dialogue maintenu avec Vladimir Poutine après le début de la guerre.
Un atout pour la visite en Arabie saoudite
Ce succès constitue également un atout de poids à quelques jours de sa visite d’État en Arabie saoudite, du 2 au 4 février. Le président français pourrait en profiter pour tenter d' »embarquer les Saoudiens » en faveur d’une stabilisation, notamment financière, du Liban, ancien protectorat français en proie à une grave crise institutionnelle depuis 2020. Même si le prince héritier Mohammed ben Salmane ne partage peut-être pas cet objectif.
Les défis de la mise en œuvre
Au-delà de l’annonce, le chemin s’annonce encore long pour une mise en œuvre effective du cessez-le-feu sur le terrain. Paris et Washington ont promis de « veiller » au respect de la trêve. Mais Israël a d’ores et déjà prévenu qu’il conserverait une « totale liberté d’action militaire » au Liban, en « accord » avec les États-Unis, et « répondrait » en cas de violation par le Hezbollah. Avec une armée libanaise aux moyens limités pour s’interposer, « la France est face à une mission délicate », avertit un expert : « conserver son indépendance et sa ligne d’influence, tout en gardant la confiance de tous les acteurs ».
Une équation complexe qui sera scrutée de près lors de la tournée saoudienne d’Emmanuel Macron. Car ce premier succès, aussi éclatant soit-il, ne sera vraiment une victoire que s’il débouche sur une paix durable. Le président français en est pleinement conscient. Tout l’enjeu est désormais de transformer l’essai, en avançant, pas après pas, sur le chemin sinueux d’une stabilisation pérenne du Liban et, au-delà, de l’ensemble de la région. Un défi de taille pour la diplomatie française, de retour aux avant-postes sur l’échiquier moyen-oriental.