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Le Sinn Fein, un élan vers le pouvoir en Irlande ?

Le Sinn Fein, parti nationaliste de gauche, espère créer la surprise aux élections en Irlande. Ancienne aile politique de l'IRA, il rêve d'unifier l'île. Mais le chemin vers le pouvoir s'annonce semé d'embûches...

À l’approche des élections législatives de vendredi en Irlande, un vent de changement semble souffler sur l’île. Le Sinn Fein, parti nationaliste de gauche qui milite pour une réunification du pays, se sent porté par un « élan » inédit dans sa quête du pouvoir.

Pendant des décennies, ce parti a été marginalisé sur la scène politique en raison de ses liens avec l’Armée républicaine irlandaise (IRA), groupe paramilitaire qui a combattu la présence britannique en Irlande du Nord jusqu’à l’accord de paix de 1998. Mais sous la houlette de sa cheffe charismatique Mary Lou McDonald, le Sinn Fein s’est débarrassé de cette image sulfureuse.

Un parti en pleine ascension

Crédité d’environ 20% d’intentions de vote dans les derniers sondages, le Sinn Fein talonne désormais les deux grands partis centristes qui dominent la vie politique irlandaise depuis un siècle : le Fianna Fail et le Fine Gael du Premier ministre sortant Simon Harris. Lors des législatives de 2020, il était même arrivé en tête en nombre de suffrages.

La formation nationaliste a fait campagne sur des thèmes chers aux électeurs, promettant de s’attaquer à la crise du logement et à la flambée du coût de la vie. Une stratégie payante selon Mary Lou McDonald, qui voit « un élan » en faveur de son parti :

C’est l’occasion d’un changement, nous sommes prêts à y aller, et nous allons demander aux gens de nous donner cette chance.

Mary Lou McDonald, cheffe du Sinn Fein

L’ombre de l’IRA s’estompe

Pourtant, il y a encore quelques années, rares étaient ceux qui auraient parié sur un tel succès. Le passé du Sinn Fein comme branche politique de l’IRA en faisait un paria. L’arrivée de Mary Lou McDonald à sa tête en 2018 a changé la donne, la dirigeante se montrant beaucoup moins clivante que son prédécesseur Gerry Adams.

Le parti a aussi bénéficié d’un basculement historique en Irlande du Nord en février dernier. Pour la première fois, une personnalité en faveur de la réunification de l’île, la vice-présidente du Sinn Fein Michelle O’Neill, a pris la tête de l’exécutif nord-irlandais.

Un référendum en ligne de mire

Fort de cette dynamique, le Sinn Fein appelle de ses vœux l’organisation d’ici 2030 d’un référendum sur l’unification de la république d’Irlande avec l’Irlande du Nord. Un objectif de longue date pour ce mouvement républicain, qui estime qu’une Irlande unie et souveraine est une aspiration légitime.

Mais ce projet divise encore profondément la société irlandaise. Et même en cas de victoire vendredi, le chemin vers le pouvoir s’annonce semé d’embûches pour le Sinn Fein. Les deux grands partis de centre-droit ont répété qu’ils refusaient de former une coalition avec lui.

Il est très difficile d’imaginer McDonald prendre la tête d’un gouvernement cette fois-ci, à moins d’un basculement des résultats et d’un changement de position du Fianna Fail sur le Sinn Fein.

Lisa Keenan, politologue à l’université Trinity College Dublin

Surmonter les réticences

Le Sinn Fein devra donc convaincre un de ses rivaux de dépasser ses réticences s’il veut accéder au pouvoir. Un défi de taille, tant les blessures de l’histoire restent vives. Mais le parti veut croire que les lignes sont en train de bouger.

Il met en avant sa progression constante dans les urnes ces dernières années et son travail de fond pour élargir sa base électorale au-delà de son socle traditionnel nationaliste. Les jeunes et les classes populaires, frappés de plein fouet par la crise, sont notamment sensibles à son discours social.

En participant aux institutions et en prouvant sa capacité à gouverner, au nord comme au sud de l’île, le Sinn Fein espère briser le plafond de verre. Et écrire une nouvelle page de l’histoire irlandaise.

Les défis à venir

Cependant, malgré ses progrès indéniables, le parti nationaliste n’est pas exempt de fragilités. Sa popularité a connu des hauts et des bas, notamment après son soutien à un référendum controversé sur la famille en 2023.

Sa position jugée trop conciliante sur l’immigration lui a aussi coûté une partie de son électorat ouvrier. Le Sinn Fein devra rassurer sur sa capacité à représenter l’ensemble de la société irlandaise s’il parvient au pouvoir.

L’attitude des forces politiques traditionnelles sera décisive. Continueront-elles à voir le Sinn Fein comme infréquentable en raison de son passé ? Ou finiront-elles par accepter de discuter avec ce parti devenu incontournable ?

Seule certitude : un séisme politique se profile en Irlande. Le Sinn Fein en sera un acteur majeur. Reste à savoir s’il pourra transformer l’essai et façonner l’avenir du pays. Les urnes livreront un premier élément de réponse vendredi.

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