Les chiffres sont sans appel. Malgré un discours politique affiché de fermeté, la France peine à expulser les immigrés clandestins présents sur son sol. C’est le constat alarmant dressé par un rapport parlementaire qui passe au crible les raisons de cet échec flagrant en matière de politique migratoire.
Le casse-tête de la coopération avec les pays d’origine
L’un des principaux obstacles identifiés par la députée et ancienne ministre Brigitte Klinkert, auteure du rapport, réside dans l’obstruction manifeste des pays sources, en particulier ceux du Maghreb. La délivrance pourtant cruciale des laissez-passer consulaires (LPC), sésames indispensables à toute expulsion, est ralentie voire refusée, bloquant de fait le processus.
Face à cette impasse, la France a tenté d’actionner le levier de la politique des visas pour faire pression, notamment sur l’Algérie. Mais cette stratégie a fait long feu, n’apportant aucun résultat probant et générant même des tensions diplomatiques contre-productives.
La justice française, autre frein majeur
Outre l’attitude peu coopérative des pays d’origine, c’est paradoxalement la justice française elle-même qui contribue à entraver les expulsions de clandestins. Le rapport pointe du doigt la multiplication des annulations judiciaires et les libérations des centres de rétention administrative (CRA). Ces dernières ont explosé, passant de 1934 en 2019 à 8141 en 2023, bien souvent par manque de perspective d’éloignement en l’absence de LPC.
Même lorsque la machine judiciaire valide une mesure d’expulsion, celle-ci se heurte fréquemment au refus pur et simple des migrants concernés d’embarquer dans les avions censés les ramener dans leur pays. Un phénomène récurrent et stable en 2024 qui paralyse encore un peu plus le dispositif.
L’illusion de la rétention plus longue
Pour tenter de débloquer la situation, les autorités ont misé sur un allongement de la durée moyenne de rétention des immigrés expulsables. Une option dont la députée Klinkert doute cependant de la pertinence et de l’efficacité. Selon elle, une rétention prolongée aura peu d’effet car les pays sources s’adapteront en conséquence en matière de coopération.
Manque de moyens et d’infrastructures
Enfin, au-delà des freins diplomatiques et judiciaires, le rapport souligne les carences matérielles qui plombent la politique d’expulsion des clandestins. En premier lieu, la lutte contre l’immigration irrégulière voit son budget amputé, limitant de fait les moyens d’action. Quant aux promesses gouvernementales d’augmenter les places en centre de rétention, elles se heurtent à de lourdes contraintes administratives et de recrutement.
Il y a une incohérence manifeste entre la volonté affichée de fermeté, martelée dans les discours, et la réalité concrète d’une politique migratoire défaillante qui échoue à expulser les clandestins.
Brigitte Klinkert, députée et ancienne ministre
Au final, ce rapport parlementaire dresse le constat implacable de l’échec patent de la France à juguler l’immigration illégale et à reconduire les clandestins dans leur pays. Un bilan d’autant plus préoccupant qu’il intervient après des années de durcissement annoncé en matière migratoire, révélant le profond décalage entre les ambitions affichées et les résultats plus que mitigés sur le terrain. La classe politique saura-t-elle en tirer les leçons pour rectifier le tir ?