C’est un cri d’alarme grave et urgent qu’a lancé lundi le secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires humanitaires, Tom Fletcher, depuis Port-Soudan. Lors de sa première visite dans cette ville devenue la capitale de facto du pays, il a alerté sur une « épidémie de violences sexuelles » d’une ampleur inacceptable contre les femmes au Soudan, ravagé par la guerre civile depuis 18 mois.
« J’ai honte que nous n’ayons pas été en mesure de vous protéger, et j’ai honte pour mes semblables hommes pour ce qu’ils ont fait », a déclaré avec émotion Tom Fletcher devant une assemblée principalement féminine. Des mots forts qui reflètent l’urgence de la situation pour les Soudanaises, premières victimes silencieuses de ce conflit fratricide.
Le Soudan en proie à une crise humanitaire sans précédent
Depuis avril 2023, le Soudan est plongé dans une guerre sanglante entre l’armée régulière et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF). Port-Soudan, ville portuaire stratégique de la mer Rouge, est ainsi devenue le nouveau centre du pouvoir, alors que la capitale Khartoum est le théâtre de combats acharnés. Les conséquences pour la population sont dramatiques :
- Des dizaines de milliers de morts
- Plus de 11 millions de personnes déplacées
- Près de la moitié des 42 millions de Soudanais menacés de famine
Selon l’ONU, il s’agit de la pire crise humanitaire de mémoire récente. Les deux camps sont accusés d’utiliser la faim comme une véritable arme de guerre contre les civils.
Des violences sexuelles « généralisées » et systématiques
Mais pour les femmes et les filles, le calvaire ne s’arrête pas là. Elles sont la cible de violences sexuelles massives et systématiques de la part des combattants, en particulier des paramilitaires des RSF. Fin octobre, un rapport d’enquête accablant de l’ONU révélait l’ampleur de ces exactions :
Les viols, y compris collectifs, sont « généralisés » au Soudan après 18 mois de guerre civile.
Rapport de la mission d’établissement des faits sur le Soudan de l’ONU
Ces violences touchent des femmes et des filles de tous âges. Certaines sont enlevées et réduites à l’esclavage sexuel par leurs bourreaux. Même les enfants ne sont pas épargnées par ces atrocités. Une situation effroyable que dénonce Tom Fletcher :
L’ampleur des violences sexuelles que nous avons constatées au Soudan est stupéfiante.
Tom Fletcher, secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires humanitaires
Mobilisation de l’ONU et appel à la communauté internationale
Lors de sa visite, le haut responsable onusien a rencontré le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l’armée et dirigeant de facto du Soudan. Il a plaidé pour une augmentation de l’aide humanitaire, alors que les ONG dénoncent les entraves bureaucratiques du gouvernement qui ralentissent son acheminement.
Mais au-delà de l’urgence alimentaire et sanitaire, Tom Fletcher a clairement appelé à mobiliser la communauté internationale pour mettre fin à cette « épidémie de violences sexuelles » et protéger les Soudanaises :
Le monde doit faire mieux pour les femmes du Soudan, qui sont exposées à des violences sexuelles systématiques.
Tom Fletcher, secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires humanitaires
Un message fort au moment où le Soudan semble sombrer dans l’oubli, éclipsé par d’autres crises. Il est plus que temps pour les dirigeants du monde entier de prendre la mesure de ce drame épouvantable qui se joue à huis clos, et d’agir concrètement pour y mettre un terme. Les femmes et les filles soudanaises ont besoin d’une mobilisation internationale d’urgence. Leur calvaire a trop duré.
