C’est une nouvelle qui en dit long sur le climat actuel en Europe. Alors que les tensions avec la Russie n’ont jamais été aussi vives depuis la fin de la Guerre Froide, l’Allemagne vient de lancer un vaste plan baptisé « offensive bunker ». L’objectif ? Répertorier tous les bunkers et abris du pays où la population pourrait se réfugier en cas d’attaque.
Selon un porte-parole du ministère allemand de l’Intérieur, cité par une source proche du dossier, l’inventaire concerne tous les bâtiments, y compris les propriétés privées, qui pourraient servir d’abri : caves, garages, stations de métro… Rien n’est laissé au hasard. Un répertoire numérique sera même créé pour permettre aux citoyens de localiser rapidement le bunker le plus proche grâce à leur smartphone.
Une Allemagne nostalgique des heures sombres ?
Cette « offensive bunker », comme l’a surnommée le quotidien Bild, suscite de nombreuses interrogations outre-Rhin. Certains y voient le signe d’une Allemagne de plus en plus inquiète, voire paranoïaque, face à la menace russe. D’autres s’interrogent sur l’utilité réelle de telles mesures, plus de 30 ans après la chute du Mur de Berlin.
Est-ce vraiment le moment de raviver les vieux démons de la Guerre Froide ?
Un éditorialiste allemand
Il faut dire que l’inventaire des bunkers rappelle étrangement les heures les plus sombres de l’histoire allemande. La plupart des 579 bunkers répertoriés à ce jour datent en effet de la Seconde Guerre mondiale ou de l’époque de la Guerre Froide. Des vestiges d’un passé que beaucoup pensaient révolu.
Un pays en première ligne face à Moscou
Pourtant, dans le contexte actuel, difficile de blâmer totalement les autorités allemandes. Avec 83 millions d’habitants, l’Allemagne serait en effet l’un des pays les plus exposés en cas de conflit ouvert avec la Russie, de par sa position géographique.
Les récentes déclarations de Vladimir Poutine n’ont fait qu’accroître les inquiétudes. Le président russe a ainsi estimé jeudi dernier que le conflit en Ukraine avait désormais tout d’une « guerre mondiale ». Et surtout, il a prévenu qu’il n’excluait pas de frapper directement les pays occidentaux, semant la panique parmi les membres de l’OTAN.
Berlin appelle les citoyens à se préparer
Face à ces menaces de moins en moins voilées, Berlin a donc décidé de passer à l’action. En plus de l’inventaire des bunkers existants, les autorités prévoient d’en construire de nouveaux dans les prochains mois. Elles encouragent également les citoyens à aménager eux-mêmes des abris dans leurs caves ou leurs garages.
Une communication anxiogène ? Peut-être. Mais dans un pays qui garde en mémoire les bombardements massifs de la Seconde Guerre mondiale, le principe de précaution semble l’emporter. Même si cela implique de se préparer au pire et de réveiller quelques vieux fantômes…
L’efficacité des bunkers en question
Reste la question de l’efficacité réelle de ces mesures. Les 579 bunkers actuels ne peuvent abriter que 480 000 personnes, soit à peine 0,6% de la population allemande. Quant aux bunkers « faits maison », leur capacité à résister à une attaque moderne semble plus que douteuse.
Certains experts militaires jugent même ce plan complètement obsolète à l’heure des missiles de croisière et des drones. Selon eux, en cas de frappe sur le sol allemand, la priorité devrait être donnée à l’évacuation des grandes villes plutôt qu’au confinement de la population dans des bunkers.
Un coup de communication ?
Dès lors, difficile de ne pas voir dans cette « offensive bunker » un coup de communication du gouvernement allemand. L’objectif serait de rassurer une opinion publique de plus en plus inquiète, tout en envoyant un message de fermeté à Vladimir Poutine.
C’est une manière de dire : nous sommes prêts à tout, y compris au pire.
Une source gouvernementale allemande
Une stratégie payante ? L’avenir le dira. En attendant, cette « offensive bunker » aura au moins eu le mérite de rappeler que la paix sur le Vieux Continent est toujours fragile. Et que le spectre d’un conflit majeur, que beaucoup pensaient disparu avec la Guerre Froide, est peut-être en train de ressurgir…
Une chose est sûre : l’inventaire des bunkers allemands n’est pas près de s’arrêter. Selon nos informations, il devrait se poursuivre dans les prochains mois, avec le soutien de l’armée et des services de renseignement. Un travail de fourmi qui témoigne de l’état d’esprit qui règne actuellement outre-Rhin. Celui d’un pays qui se prépare, discrètement mais sûrement, au pire des scénarios.