Dix ans après l’attentat islamiste qui a décimé la rédaction de Charlie Hebdo, le rédacteur en chef Riss se confie sur son combat inlassable pour la liberté d’expression. Malgré les menaces persistantes et le vacarme des anti-Charlie, il réaffirme avec force son engagement à faire vivre l’esprit de ses confrères assassinés.
« Charlie Liberté » : un hommage vibrant aux disparus
En cette année de commémoration, Charlie Hebdo sort Charlie Liberté. Le journal de leur vie, un livre en hommage à ses huit membres tombés sous les balles de la barbarie. Riss explique la genèse de cet ouvrage poignant :
Nous voulons mettre en avant les talents et la créativité de tous ces morts, afin de ne pas les réduire à des assassinés.
Photos, textes, dessins… Charlie Liberté regorge de trésors qui font revivre Cabu, Wolinski, Charb, Tignous et les autres, bien au-delà de leur tragique destin. Un message clair de Riss : Charlie Hebdo refuse d’être figé à jamais dans ce funeste 7 janvier 2015.
Riss, une cible vivante
Rescapé de l’attaque, Riss vit depuis sous haute protection policière. Mais cette épée de Damoclès permanente n’entame en rien sa détermination :
Nous ne baissons pas la tête, nous croyons à nos valeurs et nous serons encore là dans dix ans.
Derrière chacun de ses traits rageurs, on devine l’ombre de ses camarades disparus. Comme un défi lancé à leurs assassins et à tous ceux qui voudraient museler Charlie. La liberté guidant son crayon, Riss s’accroche à ce combat vital pour la démocratie.
Tenir tête aux anti-Charlie
Depuis l’attentat, les détracteurs de Charlie Hebdo ne désarment pas. Sur les réseaux sociaux, dans certains médias, à l’international… Les critiques pleuvent, parfois teintées de relativisme face à l’horreur. Une situation que Riss affronte avec un mélange de lassitude et de résilience :
Les anti-Charlie font du bruit, mais nous aussi, et ils vont devoir nous supporter encore longtemps.
Plutôt que de courber l’échine, l’hebdomadaire satirique continue de faire grincer des dents. Fidèle à sa ligne impertinente, il refuse tout politiquement correct, quitte à s’attirer les foudres des bien-pensants. Une attitude que Riss revendique comme un gage de liberté face au carcan de la pensée unique.
L’humour comme étendard
Malgré le poids du deuil et de la menace, Riss n’a jamais renoncé à manier l’arme de la dérision. Il y voit même un rempart essentiel contre l’obscurantisme :
L’humour dérange car il bouscule les certitudes. C’est sa force et sa nécessité.
En refusant la « bien-pensance étouffante », en dynamitant les tabous, Charlie trace sa route. Avec l’intime conviction que le rire, loin d’être une capitulation, reste une arme de résistance massive.
Charlie, un concentré de République
Par son combat opiniâtre, Charlie Hebdo s’inscrit dans l’héritage des Lumières et des valeurs républicaines. Une position que Riss assume pleinement :
Nous sommes un bastion de la laïcité, de la liberté d’expression, de l’anticléricalisme. Tout ce que rejettent les islamistes.
En défendant mordicus son droit au blasphème, en refusant de transiger avec ses principes, Charlie s’érige en rempart contre la barbarie. Un emblème de la France libre et indocile, qui doit tant à ces esprits trop tôt fauchés.
Faire vivre la mémoire, coûte que coûte
Avec Charlie Liberté, Riss offre un magnifique pied de nez à tous ceux qui voudraient reléguer ses confrères aux oubliettes. Chaque page est un cri : non, ces hommes libres ne seront pas morts en vain. Leur esprit frondeur, leur gouaille, leur regard affûté sur le monde continueront d’éclairer nos consciences.
Aujourd’hui comme il y a dix ans, Charlie est debout. Riss et sa équipe, rescapés et nouveaux venus confondus, portent ce flambeau avec une énergie communicative. Prêts à en découdre encore et toujours pour que jamais ne s’éteigne la flamme de la liberté. Leurs plumes et leurs crayons seront toujours là pour dessiller nos yeux avec l’impertinence comme étendard.
En ces temps troublés, gageons que l’exemple de Charlie nous rappelle cette évidence : il en faut plus pour tuer un esprit libre que des balles de kalachnikov. Oui, ils sont morts en héros et en martyrs. Mais avant tout, ils ont vécu en hommes libres, dignes, incorruptibles. C’est cela l’essentiel, et c’est cela que Riss et Charlie continueront de célébrer. Pour que jamais ne s’éteigne la flamme de la liberté.