À Bordeaux, un débat houleux oppose actuellement la mairie écologiste à une frange militante de son propre camp. Au cœur de la controverse : la décision du maire Pierre Hurmic d’armer une partie de la police municipale. Une volte-face jugée « grave et condamnable » par les Jeunes écologistes, qui y voient une trahison des valeurs vertes. Mais pour l’édile bordelais, il s’agit avant tout d’une mesure pragmatique face à « la violence qui traverse notre société ».
Un maire écologiste face au défi sécuritaire
Depuis son élection surprise en 2020, Pierre Hurmic s’efforce d’incarner une « écologie à la bordelaise », mariant verdissement de la ville et renforcement de la sécurité. Augmentation des effectifs policiers, des médiateurs, de la vidéosurveillance… L’ancien avocat ne rechigne pas à muscler son action contre la délinquance, quitte à s’attirer les foudres d’une partie de la gauche.
Mais c’est sa décision d’armer la police municipale qui cristallise aujourd’hui les tensions. Une petite révolution dans cette ville historiquement réticente au port d’arme par les agents municipaux. Pierre Hurmic, longtemps opposé à cette option, a fini par s’y résoudre, constatant que « Bordeaux, comme les autres grandes villes, n’est pas épargnée par la violence ».
Un plan global de renforcement de la sécurité
Loin de se limiter à la question de l’armement, le maire a présenté un vaste « plan de renforcement de la police municipale ». Objectifs : déployer une vraie police de proximité, former et encadrer strictement les agents armés, développer la vidéoprotection et la médiation… Une approche globale visant à « actionner tous les leviers » face à l’insécurité, sans pour autant céder à « la surenchère sécuritaire ».
Bordeaux a fait le choix d’une doctrine équilibrée, alliant fermeté et prévention. Nous refusons d’opposer écologie et sécurité.
Pierre Hurmic, maire de Bordeaux
Les Jeunes écologistes montent au créneau
Mais cette ligne ne convainc pas les Jeunes écologistes, fer de lance d’une écologie radicale et non-violente. Pour eux, « armer la police n’est pas la solution », mais une « dangereuse dérive sécuritaire » sapant une « doctrine de résolution pacifique des conflits ». Ils dénoncent un « mythe raciste de l’ensauvagement » et réclament plus de médiation, d’éducation et de justice sociale pour endiguer la violence.
Leur mobilisation a trouvé un certain écho à gauche, plusieurs élus et militants appelant le maire à revoir sa copie. Mais Pierre Hurmic assume sa décision, fruit d’un long cheminement : « l’heure n’est plus aux débats de salon mais à l’action concrète et responsable ». Tout en promettant un contrôle strict des policiers armés et la poursuite du dialogue avec les habitants.
Un débat qui transcende Bordeaux
Au-delà du cas bordelais, cette controverse illustre les dilemmes des maires écologistes face à l’insécurité. Entre fidélité aux valeurs et réponse aux attentes des citoyens, l’équation est souvent délicate. Certains, comme le Grenoblois Éric Piolle, campent sur un refus net de l’armement. D’autres, à l’instar de Pierre Hurmic, tentent une voie médiane, non sans s’exposer aux tirs croisés.
Les maires écologistes savent ce dont leurs territoires ont besoin. Faire une police avec des pâquerettes n’est pas une option. Il faut trouver le bon équilibre.
Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV
Une chose est sûre : la sécurité s’impose comme un défi majeur pour ces édiles verts, souvent novices et élus dans des villes en proie à de fortes tensions. Leur capacité à incarner une alternative crédible en la matière sera scrutée de près, à Bordeaux comme ailleurs. Avec en toile de fond, la question lancinante : peut-on être écologiste et ferme sur la sécurité ?
Quelle police pour quelle ville ?
In fine, le débat bordelais renvoie à des interrogations plus larges sur le rôle et la doctrine de la police municipale. Longtemps cantonnées à des missions de salubrité et de tranquillité publiques, ces polices locales sont de plus en plus sollicitées sur le volet sécuritaire, avec une montée en puissance de leur armement. Une tendance lourde, qui ne fait pas consensus :
- Pour les partisans, armer (avec discernement) la PM est devenu indispensable face à la violence, pour assurer la protection des citoyens et des agents eux-mêmes.
- Les opposants y voient un risque de dérive, une atteinte aux libertés et un aveu d’échec dans la résolution pacifique des conflits.
- D’autres prônent une voie médiane, avec un armement limité et encadré, couplé à un renforcement de la prévention et de la médiation.
Autant de visions qui s’affrontent, renvoyant à différentes conceptions de la sécurité et de la vie en ville. Avec en filigrane, la question du lien police-population et de la place du pouvoir municipal dans la chaîne régalienne. Le tout sur fond de tensions sociales, de violences urbaines et de montée des populismes sécuritaires.
Bref, le dossier est explosif, et les maires écologistes en première ligne. Eux qui ambitionnent de « réinventer la ville » se retrouvent confrontés à ses réalités les plus crues. Avec le défi d’incarner une alternative verte et apaisée, sans pour autant donner le sentiment de « désarmer » face à l’insécurité. Un sacré numéro d’équilibriste, dont Bordeaux offre un aperçu saisissant. L’avenir dira si Pierre Hurmic a trouvé la bonne formule, ou s’il a cédé à la pression sécuritaire au prix de ses valeurs. Une chose est sûre : le débat ne fait que commencer, ici comme ailleurs…
Au-delà du cas bordelais, cette controverse illustre les dilemmes des maires écologistes face à l’insécurité. Entre fidélité aux valeurs et réponse aux attentes des citoyens, l’équation est souvent délicate. Certains, comme le Grenoblois Éric Piolle, campent sur un refus net de l’armement. D’autres, à l’instar de Pierre Hurmic, tentent une voie médiane, non sans s’exposer aux tirs croisés.
Les maires écologistes savent ce dont leurs territoires ont besoin. Faire une police avec des pâquerettes n’est pas une option. Il faut trouver le bon équilibre.
Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV
Une chose est sûre : la sécurité s’impose comme un défi majeur pour ces édiles verts, souvent novices et élus dans des villes en proie à de fortes tensions. Leur capacité à incarner une alternative crédible en la matière sera scrutée de près, à Bordeaux comme ailleurs. Avec en toile de fond, la question lancinante : peut-on être écologiste et ferme sur la sécurité ?
Quelle police pour quelle ville ?
In fine, le débat bordelais renvoie à des interrogations plus larges sur le rôle et la doctrine de la police municipale. Longtemps cantonnées à des missions de salubrité et de tranquillité publiques, ces polices locales sont de plus en plus sollicitées sur le volet sécuritaire, avec une montée en puissance de leur armement. Une tendance lourde, qui ne fait pas consensus :
- Pour les partisans, armer (avec discernement) la PM est devenu indispensable face à la violence, pour assurer la protection des citoyens et des agents eux-mêmes.
- Les opposants y voient un risque de dérive, une atteinte aux libertés et un aveu d’échec dans la résolution pacifique des conflits.
- D’autres prônent une voie médiane, avec un armement limité et encadré, couplé à un renforcement de la prévention et de la médiation.
Autant de visions qui s’affrontent, renvoyant à différentes conceptions de la sécurité et de la vie en ville. Avec en filigrane, la question du lien police-population et de la place du pouvoir municipal dans la chaîne régalienne. Le tout sur fond de tensions sociales, de violences urbaines et de montée des populismes sécuritaires.
Bref, le dossier est explosif, et les maires écologistes en première ligne. Eux qui ambitionnent de « réinventer la ville » se retrouvent confrontés à ses réalités les plus crues. Avec le défi d’incarner une alternative verte et apaisée, sans pour autant donner le sentiment de « désarmer » face à l’insécurité. Un sacré numéro d’équilibriste, dont Bordeaux offre un aperçu saisissant. L’avenir dira si Pierre Hurmic a trouvé la bonne formule, ou s’il a cédé à la pression sécuritaire au prix de ses valeurs. Une chose est sûre : le débat ne fait que commencer, ici comme ailleurs…