C’est une nouvelle qui ébranle le monde littéraire et au-delà. Boualem Sansal, célèbre écrivain algérien et virulent critique du régime, a été arrêté et incarcéré dès son arrivée à l’aéroport d’Alger samedi dernier. Âgé de 75 ans, celui qui vient d’être couronné du prestigieux Prix Goncourt pour son dernier roman dystopique « 2084 : la fin du monde », n’a plus donné signe de vie depuis, suscitant l’inquiétude de ses proches et un début de mobilisation internationale.
Selon une source proche du dossier, l’opposant de longue date au pouvoir algérien aurait été interpellé par la police aux frontières puis conduit directement en prison, sans explication ni référence à une quelconque procédure légale. Un sort qui n’est pas sans rappeler celui d’autres intellectuels et journalistes emprisonnés ces dernières années pour avoir osé élever la voix contre le système en place.
Un écrivain engagé, cible du régime
Depuis des décennies, Boualem Sansal paye au prix fort son combat acharné pour la liberté d’expression. Ses livres, qui dénoncent avec force la corruption et la dérive autoritaire du régime, sont interdits de publication en Algérie. Menacé et harcelé, il a même été révoqué en 2003 de son poste de haut fonctionnaire au ministère de l’Industrie après avoir publié son premier roman « Le Serment des barbares ».
Ceux qui défendent la liberté de parole et de création en Algérie savent qu’ils risquent la prison, comme je l’expérimente à nouveau aujourd’hui. Mais nous ne renoncerons pas.
– Boualem Sansal en 2018
Une prise de position courageuse qui lui a valu d’être lauréat de nombreux prix internationaux comme le Grand Prix du roman de l’Académie française en 2015. Mais aussi d’accumuler les menaces et pressions des autorités algériennes qui n’ont eu de cesse de vouloir le faire taire.
La goutte de trop pour le pouvoir algérien ?
Alors qu’il venait de prendre la nationalité française à l’été 2024, geste ultime pour se protéger, c’est l’attribution en novembre du Goncourt au sulfureux écrivain qui semble avoir signé son arrêt. Un camouflet de trop pour le régime algérien qui n’a pas supporté de voir ainsi récompensé l’un de ses plus féroces contempteurs.
À peine une semaine après son sacre littéraire, Boualem Sansal est donc arrêté dès son retour à Alger où il comptait, comme à son habitude, passer les fêtes de fin d’année en famille. Un coup de filet qui en dit long sur l’état actuel des libertés en Algérie.
Une mobilisation internationale s’organise
Face à cette arrestation aussi arbitraire qu’injuste, une vague d’indignation monte. De nombreuses voix s’élèvent en France, de l’Académie Goncourt au Président Macron en passant par des écrivains et journalistes, pour condamner cet acte liberticide et exiger la libération immédiate de Boualem Sansal.
Des pétitions circulent, des rassemblements s’organisent, des tribunes fleurissent dans la presse pour dénoncer cette dérive autoritaire et soutenir l’écrivain menacé. Le hashtag #FreeSansal se répand comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux.
La pression internationale sera-t-elle suffisante pour faire plier le régime ? Rien n’est moins sûr tant les dirigeants algériens semblent déterminés à museler toute voix dissidente, quitte à bafouer les droits humains les plus élémentaires et à ternir un peu plus leur image sur la scène mondiale.
En attendant, le sort de Boualem Sansal reste en suspens. Privé de liberté pour le seul crime d’avoir usé de sa plume avec courage et talent pour dénoncer l’oppression, il incarne désormais avec une force renouvelée le combat sans fin pour le droit d’expression. Un droit dont il a fait sa raison de vivre et d’écrire et qu’aucune prison ne pourra lui ravir.