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Suppression du délit d’apologie du terrorisme : La gauche divisée

La proposition choc de LFI d'abroger le délit d'apologie du terrorisme divise la gauche. Gabriel Attal appelle ses homologues PS, EELV et PCF à se désolidariser des Insoumis, dénonçant une insulte aux victimes. La polémique enfle et met en lumière les profondes divisions au sein du Nouveau Front populaire. Jusqu'où iront les tensions ?

La suppression du délit d’apologie du terrorisme, proposée mardi dernier par le député LFI du Nord Ugo Bernalicis, sème la zizanie au sein de la gauche plurielle. Cette initiative, qui entend abroger une loi datant de 2014, a été qualifiée d’« ignoble » par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Mais c’est surtout le silence des autres composantes de la gauche, en dehors de LFI, qui a été pointé du doigt par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal.

Attal somme le PS, EELV et le PCF de se désolidariser de LFI

Dans un courrier cinglant adressé samedi à ses homologues socialiste Boris Vallaud, écologiste Cyrielle Chatelain et communiste André Chassaigne, le président du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale a exhorté la gauche hors-LFI à « se désolidariser » des Insoumis. Dénonçant une proposition de loi « gravissime », Gabriel Attal a estimé qu’« une limite fondamentale a été franchie : celle du respect que nous devons à toutes les victimes du terrorisme ».

L’ancien locataire de Matignon a rappelé que la loi de 2014, que LFI souhaite supprimer, avait justement été votée par « la gauche républicaine » sous François Hollande. À l’époque, cette loi visait à « réprimer les prêcheurs de haine qui menacent notre pays et les valeurs de la République », a souligné Gabriel Attal, mettant en avant son rôle dans la lutte contre la radicalisation.

La liberté d’expression menacée selon LFI

De son côté, La France insoumise justifie sa proposition choc en arguant que la loi de 2014 a « accentué l’instrumentalisation de la lutte antiterroriste » contre la liberté d’expression. Selon les Insoumis, la loi de 1881 sur la presse suffirait à « traiter des faits relevant des délits d’apologie de crime, d’apologie de crime de guerre, d’apologie de crime contre l’humanité ».

Mais cet argumentaire peine à convaincre au sein même du Nouveau Front populaire (NFP), le cartel des gauches formé il y a cinq mois dans la perspective des législatives anticipées. Comme le pointe Gabriel Attal, la proposition de loi d’Ugo Bernalicis a été déposée « sans concertation » avec les autres partenaires de la NUPES.

La classe politique indignée, la gauche embarrassée

L’initiative des Insoumis a suscité un tollé dans une large partie de la classe politique. Mais c’est le mutisme des autres composantes de la gauche qui a été jugé assourdissant par la Macronie. « Le silence de Olivier Faure, Marine Tondelier et Fabien Roussel est une forme de complicité », a taclé Gabriel Attal, appelant les dirigeants du PS, d’EELV et du PCF à clarifier leur position.

Cette polémique met en lumière les profondes divisions qui traversent la gauche unie, malgré la constitution du NFP. Si les Insoumis assument leur position, quitte à choquer, leurs partenaires semblent nettement plus mal à l’aise avec ce coup de projecteur sur les désaccords idéologiques qui les séparent de LFI.

Cette proposition de loi est une insulte à la mémoire des victimes du terrorisme et une tache indélébile sur ceux qui la portent.

Gabriel Attal, président des députés Renaissance

Les victimes du terrorisme « insultées » selon Attal

Dans son courrier, Gabriel Attal a multiplié les arguments pour dépeindre la proposition de loi des Insoumis comme une « insulte » faite aux victimes du terrorisme. Il a rappelé le rôle clé joué par la loi de 2014 pour « préserver » de nombreux jeunes de l’embrigadement djihadiste.

Sur fond de recrudescence de l’antisémitisme et de conflit israélo-palestinien, l’ancien Premier ministre a également souligné le refus persistant de LFI de qualifier le Hamas d’organisation terroriste. Un tacle à peine voilé qui accentue encore la pression sur les partenaires de la NUPES pour qu’ils prennent leurs distances avec les positions controversées de LFI.

Le spectre d’un éclatement du NFP

Au final, cette polémique sur le délit d’apologie du terrorisme agit comme un révélateur des lignes de faille qui fragilisent l’unité de la gauche. Entre des Insoumis prêts à assumer des positions clivantes et des alliés socialistes, écologistes et communistes soucieux de ne pas se laisser entraîner sur un terrain glissant, les équilibres internes du NFP n’ont jamais semblé aussi précaires.

Reste à savoir jusqu’où les partenaires de Jean-Luc Mélenchon sont prêts à aller dans la désunion. Le risque d’éclatement du cartel, à peine cinq mois après sa création, n’est plus un tabou. Et le camp présidentiel compte bien continuer à jouer des divisions de ses adversaires pour tenter de reprendre la main dans l’hémicycle. La partie d’échecs parlementaire ne fait que commencer.

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