L’annonce, samedi, par le Président Emmanuel Macron, de l’entrée de Marc Bloch au Panthéon des “Grands Hommes” français, vient saluer le parcours exceptionnel d’un historien, patriote et résistant, qui a consacré sa vie à la recherche de la vérité et à la défense des valeurs républicaines, jusqu’à en payer le prix ultime.
Un historien visionnaire et humaniste
Né en 1886 à Lyon, Marc Bloch grandit dans une famille juive non pratiquante. Brillant étudiant, il devient professeur à la Sorbonne en 1936. Médiéviste reconnu, il co-fonde en 1929 la prestigieuse revue des “Annales d’histoire économique et sociale”, qui révolutionne l’approche historique en s’intéressant aux mentalités, croyances et façons de penser, plutôt qu’aux grands noms et événements.
Marc Bloch est le fondateur de l’histoire des mentalités, des croyances, des façons de penser.
Julien Théry, historien
Son maître-livre Les Rois thaumaturges (1924) marquera des générations d’historiens à travers le monde. Passionné de la République, il signe dans les années 1930 le manifeste des intellectuels antifascistes.
Du poilu au vieux capitaine
Engagé volontaire lors de la Première Guerre mondiale, Marc Bloch est à nouveau mobilisé en 1939, à 53 ans, malgré une santé fragile. “Je suis le plus vieux capitaine de l’armée française”, disait ce patriote avec humour et abnégation. De la débâcle de 1940, il tirera L’Étrange défaite, une analyse sans concession du “plus atroce effondrement de notre histoire”.
Un juif athée, exclu puis réfugié
Bien que juif non pratiquant, Marc Bloch est exclu de l’enseignement par les lois anti-juives du régime de Vichy en 1940. Réfugié dans le sud puis le centre de la France, il écrit : “La France, dont certains conspireraient à m’expulser (…) demeurera, quoi qu’il arrive, la patrie dont je ne saurais déraciner mon cœur”.
Le choix de la Résistance
Malgré les risques, Marc Bloch choisit de s’engager dans la Résistance à Lyon sous divers pseudonymes. Il intègre le mouvement Franc-Tireur et constitue les comités de libération de la région. Arrêté le 8 mars 1944, il est torturé pendant des jours par la Gestapo.
Fusillé pour avoir “chéri la vérité”
Le 16 juin 1944, Marc Bloch est fusillé dans le dos avec 29 autres résistants près de Lyon. Ses cendres reposeront au cimetière du Bourg-d’Hem, avec cette épitaphe : “Dilexit veritatem” (“Il a chéri la vérité”). Un hommage poignant à cet homme d’exception, historien humaniste et citoyen engagé jusqu’au sacrifice suprême.
L’entrée au Panthéon de Marc Bloch, décidée par Emmanuel Macron, résonne comme la reconnaissance ultime d’une Nation à l’un de ses plus éminents serviteurs, qui sut allier l’amour de la vérité historique à celui de la patrie et de la liberté. Une leçon d’humanité et de courage qui, près de 80 ans après sa mort tragique, n’a rien perdu de sa force et de son actualité.