La crise politique qui secoue le Venezuela depuis la réélection contestée de Nicolas Maduro en juillet dernier connaît un nouveau rebondissement. D’après une source proche du dossier, le parquet vénézuélien a annoncé l’ouverture d’une enquête pour “trahison” à l’encontre de la chef de l’opposition Maria Corina Machado. Cette figure de proue du mouvement anti-Maduro est accusée de soutenir les sanctions américaines destinées à faire pression sur le régime en place.
Une loi américaine au cœur des tensions
Le projet de loi Bolivar, récemment adopté par la Chambre des représentants des États-Unis, est la pomme de discorde. Il prévoit d’interdire aux entreprises et institutions américaines de signer des contrats avec des entités liées au “gouvernement illégitime de Nicolas Maduro”. Une mesure que Caracas qualifie d’“attaque criminelle” et juge contraire à la Charte des Nations unies.
C’est le soutien présumé de Maria Corina Machado à ce texte qui lui vaut aujourd’hui d’être dans le collimateur de la justice vénézuélienne. Le parquet estime que ses déclarations en faveur de la loi Bolivar “constituent une trahison à la patrie” et relèvent d’une “conspiration avec des pays étrangers”. Des accusations lourdes qui témoignent de la tension extrême entre le pouvoir et l’opposition depuis le scrutin présidentiel de juillet.
Une présidentielle entachée d’irrégularités
Nicolas Maduro a été proclamé vainqueur de cette élection par le Conseil national électoral, un organisme acquis à sa cause selon l’opposition. Mais aucun décompte exact des bulletins n’a été publié, officiellement en raison d’un piratage informatique jugé peu crédible par de nombreux observateurs. De son côté, l’opposition affirme détenir des procès-verbaux prouvant la victoire de son candidat, Edmundo Gonzalez Urrutia, avec plus de 67% des voix.
Cependant, le pouvoir a balayé ces documents, les taxant de “faux”. Incapable de faire reconnaître sa victoire, Edmundo Gonzalez Urrutia a dû fuir en Espagne en septembre. Quant à Maria Corina Machado, écartée de la course présidentielle pour inéligibilité, elle vit désormais dans la clandestinité au Venezuela, d’où elle continue à mobiliser ses partisans via les réseaux sociaux.
Washington reconnaît l’opposant comme “président élu”
Si Nicolas Maduro s’accroche au pouvoir malgré la contestation, sa légitimité est de plus en plus remise en cause sur la scène internationale. Les États-Unis ont refusé de reconnaître sa réélection et viennent d’accorder leur reconnaissance à Edmundo Gonzalez Urrutia en tant que “président élu” du Venezuela.
C’est un nouvel affront pour Maduro, qui accuse Washington d’orchestrer un “coup d’État” contre lui.
– Un diplomate vénézuélien souhaitant garder l’anonymat
La répression s’intensifie, l’opposition ne désarme pas
Loin de calmer le jeu, l’enquête visant Maria Corina Machado semble au contraire attiser les braises de la contestation. Des militants anti-Maduro y voient la preuve que le régime est aux abois et n’a plus que la manière forte à opposer au rejet populaire. Depuis l’élection, les manifestations se multiplient à travers le pays, souvent durement réprimées par les forces de l’ordre.
- 19 personnes ont été tuées lors de manifestations depuis la présidentielle
- Plus de 700 opposants ont été arrêtés selon des ONG de défense des droits humains
- Maria Corina Machado appelle à “intensifier la lutte pacifique” contre le “régime illégitime” de Maduro
Face à cette escalade répressive, l’opposition vénézuélienne ne compte pas baisser les bras. Si Maria Corina Machado est aujourd’hui menacée de poursuites, elle n’en continue pas moins à incarner la résistance au chavisme. Ses partisans la décrivent comme une “combattante indomptable” qui ne se laissera pas intimider par ce qu’ils qualifient de “manœuvre désespérée d’un pouvoir illégitime et corrompu”.
Une issue à la crise encore incertaine
Mais au-delà des déclarations de défi, l’opposition vénézuélienne est consciente de la gravité de la situation. L’enquête contre Maria Corina Machado marque une nouvelle étape dans la confrontation avec le chavisme, dont l’issue demeure incertaine. Si Maduro paraît fragilisé par la contestation de sa réélection et les sanctions internationales, il conserve des soutiens clés, notamment au sein de l’armée.
La bataille sera longue et difficile. Maduro ne partira pas de son plein gré. Seule la pression populaire et internationale pourra le contraindre à accepter une transition démocratique.
– Un proche conseiller d’Edmundo Gonzalez Urrutia
Dans ce bras de fer qui s’éternise, le Venezuela s’enfonce chaque jour un peu plus dans une crise politique, économique et sociale sans précédent. L’hyperinflation, les pénuries et l’insécurité nourrissent un profond mécontentement populaire. Mais en face, le régime de Maduro semble déterminé à s’accrocher au pouvoir par tous les moyens, quitte à franchir de nouveaux paliers dans la répression.
L’enquête visant Maria Corina Machado apparaît ainsi comme un nouveau signe inquiétant de la dérive autoritaire du chavisme. Un avertissement aussi à tous ceux qui, au Venezuela, rêvent encore d’une alternance démocratique. La route s’annonce longue et semée d’embûches pour l’opposition. Mais dans l’adversité, des figures comme Maria Corina Machado entendent bien continuer le combat, au nom d’un Venezuela réconcilié et tourné vers l’avenir.