Le géant français de la défense Thales se retrouve une nouvelle fois dans la tourmente. Alors que le groupe est déjà visé par plusieurs enquêtes pour corruption à l’international, de nouvelles investigations viennent d’être lancées conjointement par les autorités françaises et britanniques. Ces soupçons porteraient notamment sur un important contrat d’armement en Asie.
Une enquête menée sur deux fronts
C’est le Serious Fraud Office (SFO) britannique, l’autorité de lutte contre la grande délinquance financière, qui a révélé l’existence de cette nouvelle procédure. Selon le SFO, l’enquête est diligentée en collaboration avec le Parquet National Financier (PNF) en France. Les deux instances entendent explorer minutieusement l’ensemble des pistes concernant ces graves allégations.
Du côté français, une source judiciaire indique que les investigations ont débuté en juillet 2024. Les chefs d’accusation incluent notamment la corruption et le trafic d’influence d’agent public étranger, ainsi que le recel et le blanchiment de ces délits. Si les autorités restent discrètes sur les détails de l’affaire, il semblerait qu’un important contrat d’armement conclu par Thales en Asie soit particulièrement dans le viseur des enquêteurs.
Thales confirme l’ouverture d’une enquête
Contacté par la presse, le groupe Thales a confirmé que quatre de ses filiales, en France et au Royaume-Uni, faisaient effectivement l’objet d’une procédure judiciaire initiée par le SFO et le PNF. La multinationale spécialisée dans les hautes technologies de défense et de sécurité assure se conformer à l’ensemble des réglementations nationales et internationales en vigueur. Elle indique ne pas souhaiter faire davantage de commentaires tant que l’enquête est en cours.
Un groupe dans la tourmente judiciaire
Ces nouveaux soupçons viennent s’ajouter à une série d’affaires visant Thales ces dernières années. Le fleuron français de l’industrie de défense fait déjà l’objet de plusieurs enquêtes, en France et à l’étranger :
- Perquisitions menées fin juin dans le cadre de deux enquêtes ouvertes en 2016 et 2023, concernant des ventes de matériel militaire à l’international.
- Enquête préliminaire dévoilée en mai 2023 sur des soupçons de corruption pour décrocher un contrat en Inde.
- Investigations lancées fin 2020 autour du transfert d’un ex-salarié de Thales à un poste à l’ONU, client du groupe.
- Possible procès à venir dans le dossier des sous-marins vendus à la Malaisie en 2002..
Un acteur majeur du secteur de la défense
Présent dans 68 pays, Thales emploie plus de 81 000 salariés à travers le monde. Le groupe réalise la moitié de son chiffre d’affaires dans le secteur de la défense. Il conçoit et produit une large gamme d’équipements militaires de haute technologie : radars, munitions, satellites, systèmes de défense antiaérienne… Des matériels vendus aux quatre coins du globe.
L’entreprise est un fournisseur stratégique des forces armées françaises. Elle équipe notamment les avions de combat Rafale et est impliquée dans le projet de char franco-allemand du futur. L’Etat français et Dassault Aviation figurent parmi ses principaux actionnaires.
L’industrie de défense face aux risques de corruption
Les affaires visant Thales illustrent les risques de dérives dans un secteur particulièrement opaque et concurrentiel. Les grands contrats d’armement internationaux, portant sur des montants considérables, sont régulièrement entachés de soupçons de malversations.
Dans l’industrie de défense, la frontière entre les pratiques commerciales légitimes et la corruption peut parfois être ténue. Une grande vigilance s’impose pour les entreprises.
Un expert du secteur
Face à la multiplication des procédures judiciaires, de nombreux acteurs de l’armement ont renforcé leurs dispositifs de conformité et de contrôle interne ces dernières années. L’enjeu est d’identifier et de prévenir les risques, mais aussi de favoriser une culture éthique au sein des organisations. Un défi de taille pour ces multinationales présentes dans des dizaines de pays, avec des législations et des pratiques commerciales très variables.
Les enquêtes visant Thales constituent donc un nouveau signal d’alerte pour l’industrie tricolore. Elles démontrent la détermination croissante des autorités à traquer et sanctionner les cas de corruption à grande échelle. Dans ce contexte, la transparence et l’exemplarité s’imposent plus que jamais comme des impératifs stratégiques pour les entreprises de défense.
