Une véritable tempête secoue actuellement Bercy. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire est sous le feu des critiques, accusé par l’opposition d’avoir sciemment dissimulé au Parlement l’ampleur du dérapage du déficit public. Face à ces allégations qu’il juge “graves et infondées”, le ministre s’est défendu avec vigueur devant les sénateurs.
Un déficit qui s’envole, le gouvernement pris de court
Alors que le gouvernement tablait initialement sur un déficit public contenu à 4,9% du PIB pour 2023, les dernières estimations font état d’un dérapage brutal à 5,5%. Un écart significatif de plus de 20 milliards d’euros qui soulève de nombreuses interrogations sur la gestion des finances publiques et la transparence de l’exécutif.
Face aux sénateurs, Bruno Le Maire a tenté de justifier ce dérapage en invoquant des recettes fiscales inférieures aux prévisions, notamment au niveau de l’impôt sur les sociétés. Il a assuré que toutes les informations avaient été transmises “en temps utile” au Parlement et que des mesures correctives étaient déjà engagées.
10 milliards d’économies actées, 10 milliards supplémentaires recherchés
Pour redresser la barre, le ministre a rappelé que 10 milliards d’euros d’économies avaient déjà été réalisées sur les dépenses de l’État. Mais cela ne suffira pas. Le gouvernement est maintenant en quête de 10 milliards d’euros de coupes budgétaires additionnelles pour 2024. Un effort conséquent qui devra être consenti pour respecter la trajectoire de réduction du déficit.
Des accusations de rétention d’information balayées
Malgré les justifications avancées, l’opposition n’en démord pas. Pour le rapporteur LR Jean-François Husson, le gouvernement aurait délibérément retenu des informations sur le dérapage budgétaire pendant l’examen du projet de loi de finances. Une “rétention d’informations” que Bruno Le Maire a fermement démentie:
J’ai toujours fait preuve, depuis sept ans que je suis ministre de l’Économie des Finances, de sincérité, d’honnêteté et de sens de la vérité.
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie
Il a mis en avant le caractère évolutif et incertain des prévisions de déficit, soumises à de nombreux aléas conjoncturels. Selon lui, communiquer des estimations provisoires en décembre aurait été contre-productif et source de confusion.
Un déficit d’information assumé pour ne pas inquiéter les marchés
Bruno Le Maire l’assume : il a préféré ne pas ébruiter des chiffres alarmistes mais incertains pour ne pas affoler inutilement les investisseurs et faire grimper la spread, l’écart de taux d’emprunt entre la France et l’Allemagne. Un choix stratégique guidé par la prudence donc, mais qui lui vaut aujourd’hui ces accusations de dissimulation.
Face à la bronca, le ministre concède toutefois “une erreur” dans l’évaluation des remontées fiscales, en particulier sur l’impôt sur les sociétés. Il promet qu’une telle bourde ne se reproduira pas et qu’elle fera l’objet d’un examen approfondi dans son ministère.
Vers davantage de transparence budgétaire
Soucieux d’apaiser les esprits, Bruno Le Maire s’est dit ouvert à une communication “plus régulière” et “plus transparente” entre le gouvernement et le Parlement sur les finances publiques. L’Inspection générale des finances a d’ailleurs été missionnée pour plancher sur une amélioration du circuit de prévision et formuler des recommandations.
Cette polémique sur le déficit met en lumière toute la difficulté de piloter les comptes publics dans un environnement économique instable et incertain. Elle ravive aussi le débat sur l’équilibre délicat entre transparence démocratique et gestion des attentes des marchés financiers. Une équation complexe à laquelle le gouvernement devra apporter des réponses pour sortir de cette zone de turbulences politiques et budgétaires.