Face à un déficit jugé « insoutenable », la Cour des comptes sort l’artillerie lourde. Dans un rapport publié ce mercredi 29 mai, l’institution financière préconise des mesures chocs pour tenter de renflouer les caisses de la Sécurité sociale. Au cœur de sa ligne de mire : l’indemnisation des arrêts maladie et le prix des médicaments innovants. Des propositions explosives qui ne manqueront pas de faire réagir.
Un déficit abyssal qui empire d’année en année
Selon les prévisions du gouvernement épinglées par la Cour des comptes, le « trou de la Sécu » devrait atteindre le montant vertigineux de 17,2 milliards d’euros en 2027. Une dégradation continue et non maîtrisée des comptes qui plonge notre système de protection sociale dans le rouge vif. Face à cette situation jugée intenable, la Cour des comptes appelle à un sursaut et préconise des remèdes de cheval.
Des arrêts maladie dans le viseur
Première cible des économies préconisées : les indemnisations des arrêts de travail pour maladie. La Cour pointe du doigt une explosion de 50% des dépenses entre 2017 et 2022, pour atteindre la somme faramineuse de 12 milliards d’euros. Plusieurs pistes sont avancées pour serrer la vis :
- Ne plus indemniser les arrêts de moins de 8 jours, pour une économie de 470 millions d’euros
- Porter le délai de carence à 7 jours, afin de grappiller 950 millions d’euros
- Réduire la durée maximale d’indemnisation de 3 à 2 ans, pour récupérer 750 millions
Des mesures qui risquent de faire grincer bien des dents, notamment du côté des syndicats et des salariés. La Cour des comptes appelle également à un meilleur contrôle des prescriptions des médecins et à une lutte renforcée contre la fraude.
Des exonérations de cotisations dans le collimateur
Autre levier actionné pour renflouer les caisses : raboter les exonérations de cotisations sociales sur les compléments de salaire. Prévoyance, titres-restaurants, intéressement… Ces coups de pouce des employeurs, qui représentaient 87,5 milliards d’euros en 2022, sont pointés du doigt. Leur exonération ampute les recettes de la Sécu de 18 milliards d’euros selon les calculs des magistrats financiers. De quoi donner des sueurs froides au patronat.
Médicaments innovants : des remises plus rapides
Dans sa traque aux économies, la Cour des comptes n’épargne pas non plus les laboratoires pharmaceutiques. Elle préconise une meilleure régulation des médicaments anti-cancéreux innovants, dont le coût exorbitant pèse sur les comptes de la Sécurité sociale. En 2022, la facture s’élevait à 5,9 milliards d’euros pour l’Assurance maladie. La Cour réclame notamment de « pouvoir renégocier le prix des médicaments lorsque des études montrent des résultats inférieurs à ceux attendus ».
Il y a des gisements importants d’économies, mais il faudra de la volonté politique pour les mettre en œuvre.
Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes
Reste à savoir si le gouvernement aura le cran politique de s’attaquer à ces dossiers brûlants. Car derrière les milliards d’économies espérées, ce sont bien des remises en cause profondes de notre modèle social qui se profilent. Patients, salariés, employeurs… Qui sera prêt à mettre la main à la poche pour combler le gouffre ? La bataille promet d’être féroce.