À l’approche de l’Aïd-el-Kébir, la fête traditionnelle musulmane du sacrifice, la tension monte entre les autorités religieuses et le représentant de l’État dans les Alpes-Maritimes. Le préfet Hugues Moutouh a en effet rappelé à l’ordre les responsables du culte musulman concernant l’épineuse question de l’abattage rituel des moutons. Un sujet brûlant qui divise et qui pourrait bien gâcher la fête pour de nombreux fidèles.
Le préfet sermonne les autorités musulmanes
Lors d’une ultime réunion préparatoire en préfecture lundi, le ton est monté entre Hugues Moutouh et les représentants de la communauté musulmane. Ces derniers ont en effet boudé le rendez-vous, estimant ne pas avoir été entendus lors des précédentes rencontres. Au cœur du litige : l’absence d’abattoirs agréés dans le département pour procéder au sacrifice rituel des moutons, comme l’exige la tradition de l’Aïd-el-Kébir.
Si les services de l’État reconnaissent « un déficit chronique » de sites d’abattage, le préfet a tenu à remettre les pendules à l’heure. Pour lui, c’est aux responsables du culte d’organiser la fête, « y compris le rite sacrificiel ». Et de pointer du doigt l’absence de tout « projet » en ce sens de leur part. Un constat qui passe mal du côté des autorités musulmanes.
Des interdictions pour éviter les dérives
Face à cette situation de blocage, le préfet a sorti l’artillerie lourde mercredi en prenant plusieurs mesures d’interdiction. Exit l’abattage rituel en dehors des abattoirs agréés. Toute personne détenant des ovins ou caprins vivants sans pouvoir justifier d’une déclaration est également dans le viseur, tout comme le transport d’animaux en dehors de certains cas précis.
L’objectif affiché est clair : éviter la création d’abattoirs clandestins et le non-respect des règles sanitaires et de protection animale. L’an dernier, plusieurs « boucheries sauvages » avaient ainsi été démantelées autour de l’Aïd-el-Kébir à Nice, avec tous les risques que cela comporte en termes d’hygiène et de santé publique.
Les fidèles partagés
Du côté des musulmans, c’est l’incompréhension et la colère qui dominent. Beaucoup ont le sentiment d’être « privés » de fête, contraints de se rabattre sur les abattoirs du Var pour se procurer leur mouton. Une situation ubuesque pour Otmane Aissaoui, président de l’Union des musulmans des Alpes-Maritimes :
C’est bien malheureux car on ne fait pas tourner l’économie locale de notre territoire !
Otmane Aissaoui, président de l’Union des musulmans des Alpes-Maritimes
S’il condamne fermement les pratiques clandestines, le responsable ne décolère pas face à ce qu’il considère comme un manque de volonté politique. Et de pointer les conséquences pour les fidèles les plus modestes, qui peinent déjà à réunir la somme nécessaire pour acheter leur mouton de l’Aïd.
Une chose est sûre, le bras de fer entre autorités musulmanes et services de l’État est loin d’être terminé. Et il faudra sans doute plus qu’un rappel à l’ordre préfectoral pour apaiser les tensions communautaires à l’approche de ce rendez-vous religieux si important. D’ici là, chacun croise les doigts pour que la fête ne soit pas gâchée et que le dialogue finisse par l’emporter. Réponse dans quelques semaines.