Le milliardaire Elon Musk, tout juste nommé conseiller spécial du président américain Donald Trump, vient de dévoiler les grandes lignes de son projet de réforme « radicale » de l’État fédéral. Au menu : des suppressions d’emplois massives dans la fonction publique, l’abandon de nombreuses subventions et une vague de dérégulation sans précédent.
Un mandat clair pour un « changement radical »
Nommé à la tête d’une nouvelle « commission à l’efficacité gouvernementale » aux côtés de l’homme d’affaires Vivek Ramaswamy, Elon Musk n’a pas perdu de temps pour détailler son plan d’attaque. Dans une tribune publiée par le Wall Street Journal, le dirigeant de Tesla et SpaceX affirme que les électeurs ont donné « un mandat clair pour un changement radical » à Donald Trump lors de sa réélection en novembre dernier.
Pour mener à bien cette transformation en profondeur de l’appareil d’État, Elon Musk compte s’appuyer sur de récentes décisions de la Cour suprême, dont la majorité conservatrice a été renforcée par le président Trump lors de son premier mandat. Selon l’analyse du milliardaire, ces jugements ouvrent la voie à la suspension immédiate par décret présidentiel d’une multitude de régulations fédérales qui n’ont pas reçu l’aval explicite du Congrès.
Fonctionnaires dans le viseur
Mais c’est surtout du côté des effectifs de la fonction publique fédérale qu’Elon Musk entend frapper fort. Il promet ainsi des « réductions massives » dans ce qu’il qualifie de « bureaucratie fédérale », avec à la clé un vaste plan d’accompagnement des fonctionnaires licenciés vers le secteur privé, ou à défaut des conditions de départ « décentes ».
Le recours au télétravail dans l’administration, largement développé depuis la pandémie de Covid-19, est également dans le collimateur. Sa remise en cause devrait, selon Elon Musk, entraîner « une vague bienvenue de départs volontaires ».
500 milliards de coupes budgétaires
Côté dépenses, le milliardaire avance le chiffre vertigineux d’au moins 500 milliards de dollars d’économies réalisables en supprimant rapidement des subventions « à l’audiovisuel public ou à des organisations progressistes » comme le Planning familial.
Nous faisons les choses différemment. Nous sommes des entrepreneurs, pas des politiciens. Nous taillerons dans les coûts.
Elon Musk et Vivek Ramaswamy dans le Wall Street Journal
Musk et Ramaswamy se veulent rassurants sur la durée de leur mission, qui doit s’achever le 4 juillet 2026, date du 250e anniversaire de la déclaration d’indépendance des États-Unis. L’objectif affiché est clair : recentrer l’État fédéral sur ses fonctions régaliennes en démantelant au passage une grande partie de son action dans le domaine économique et social.
Levée de boucliers attendue
Ce projet radical de refonte du périmètre et du fonctionnement de l’État fédéral va sans nul doute susciter une vive opposition, aussi bien chez les démocrates que dans une frange des républicains attachés au rôle de la puissance publique. Les syndicats de fonctionnaires ont d’ores et déjà fait part de leur intention de contester en justice toute tentative de remise en cause du statut de la fonction publique.
De son côté, la Maison Blanche se veut confiante. Selon une source proche de l’exécutif, le soutien de la Cour suprême et l’expérience entrepreneuriale d’Elon Musk sont des atouts décisifs pour mener à bien ce chantier titanesque. Le locataire du Bureau ovale semble déterminé à laisser une empreinte durable en engageant une véritable « révolution conservatrice », quitte à attiser les tensions dans un pays déjà profondément divisé.
Quelle crédibilité pour Musk ?
Reste à savoir si Elon Musk parviendra à convaincre de sa légitimité pour mener à bien une telle réforme. Le milliardaire, connu pour ses coups d’éclat et ses déclarations controversées, n’est pas réputé pour son expérience des arcanes de l’administration fédérale. Certains observateurs soulignent également le paradoxe de voir cet entrepreneur, dont les sociétés comme SpaceX profitent largement de généreux contrats fédéraux, vouloir raboter les dépenses publiques.
De plus, en s’attaquant frontalement aux régulations environnementales ou de protection des consommateurs, Elon Musk pourrait être soupçonné de défendre avant tout les intérêts de ses propres entreprises, tout en ouvrant la voie à un démantèlement plus large des garde-fous face aux dérives du marché.
Elon Musk est un génie pour créer des entreprises innovantes. Mais est-il vraiment qualifié pour réformer le gouvernement ? J’ai des doutes.
Janet Yellen, secrétaire au Trésor
Pour autant, le milliardaire peut compter sur de solides soutiens au sein du camp conservateur et dans le monde des affaires, qui voient d’un bon œil ce projet de détricotage de « l’État profond ». Adoubé par Donald Trump himself, Elon Musk dispose d’une marge de manœuvre politique importante pour avancer ses pions, quitte à bousculer l’establishment de Washington.
Le coup d’envoi de ce qui s’annonce comme une bataille rangée autour du rôle et du périmètre de l’État fédéral est désormais donné. Nul doute que l’intense bras de fer qui s’engage sera scruté bien au-delà des frontières américaines, tant il pourrait préfigurer une remise en cause plus large, à l’échelle occidentale, de pans entiers de l’action publique au nom de l’efficacité et d’une vision minimaliste des missions de la puissance publique. Affaire à suivre de très près…