Dans l’est de l’Ukraine, la situation devient de plus en plus critique pour les civils pris en étau entre l’avancée des forces russes et la nécessité de fuir pour survivre. Au fil des jours, les villages se vident de leurs habitants, laissant place à des paysages fantômes où seules subsistent les traces d’une vie brisée par la guerre.
Des localités désertées sur fond de progression russe
Le long des routes menant vers Kourakhové, dans la région de Donetsk, les maisons éventrées par les bombes s’alignent, telles des carcasses abandonnées. Les champs alentours, jonchés de débris, témoignent de la violence des combats qui font rage dans cette zone stratégique, riche en ressources minières et noeud logistique crucial pour les forces ukrainiennes.
Jour après jour, l’armée russe gagne du terrain, progressant au nord, au sud et à l’est, contraignant la population à un exode sans fin. Selon une analyse récente de l’AFP basée sur les données de l’Institut pour l’étude de la guerre (ISW), c’est dans cette région que Moscou a enregistré ses plus grandes avancées ces derniers mois, un mouvement qui ne cesse de s’accélérer.
Les derniers commerces ferment leurs portes
À Andriïvka, localité voisine de Kourakhové, les étals de la supérette sont aussi clairsemés que la clientèle. “Ce sont les derniers pains, prenez-les”, lance l’épicier à une cliente, avant d’annoncer la fermeture prochaine de son commerce, l’un des derniers encore ouverts dans la région.
Malgré les bombes russes qui “volent tous les jours”, Anatoliï, 37 ans, s’accroche pour aider les personnes âgées et handicapées des villages alentours qui n’ont pas encore pu partir. Mais quand l’électricité sera coupée, lui aussi prendra la route de l’exil pour rejoindre sa femme et son jeune enfant, déjà partis loin de ce quotidien fait de peur et de privations.
Partir ou rester, un dilemme cornélien pour les civils
Face à l’urgence de la situation, les appels à évacuer se multiplient sur les téléphones des habitants. “Chers habitants de la région de Donetsk ! Sauvez votre vie et celle de vos proches ! Évacuez !”, peut-on lire sur les messages envoyés par les autorités.
Pourtant, certains résistent encore et toujours à l’envahisseur russe. C’est le cas de Fédir Gjyvine, 69 ans, qui refuse pour l’instant de quitter sa maison. Il s’affaire à mettre des légumes en bocaux pour passer l’hiver dans son abri où il se réfugie lors des frappes quotidiennes. Malgré son âge, Fédir est prêt à “se battre pour son pays”. Il concède cependant qu’il partira si les forces russes s’approchent encore, un scénario de plus en plus probable alors que Moscou vient d’annoncer la capture de Voznessenka, à seulement une quinzaine de kilomètres.
Entre espoir de paix et crainte d’une nouvelle offensive
Debout dans une rue déserte de Datchné, Olga, institutrice de 59 ans, contemple les ruines de son école, témoins silencieux de la violence des bombardements. Malgré le fracas des explosions qui résonnent sans discontinuer, elle espère encore “la paix en 24 heures” promise par le président américain Donald Trump nouvellement élu. “On veut juste la paix”, soupire-t-elle, “même s’il faut traiter avec le diable”.
Mais à mesure que l’on s’approche de la ligne de front, les espoirs de paix semblent bien minces. Partout, de nouvelles lignes de défense ukrainiennes surgissent, transformant chaque bosquet en zone de combat et chaque champ en tranchée. De quoi raviver chez les habitants la crainte d’une avancée russe plus profonde encore dans cette région martyre de l’est de l’Ukraine, où la guerre ne laisse que peu de répit aux civils pris en étau.