A quelques jours des élections locales en Tanzanie, l’atmosphère politique s’alourdit. Le principal parti d’opposition, Chadema, a vivement protesté mardi contre la disqualification “injuste” de plusieurs de ses candidats. Ces élections, prévues le 27 novembre dans les villes et villages du pays, sont attendues comme un baromètre du paysage politique tanzanien avant la présidentielle d’octobre 2025.
Un premier test pour la présidente Samia Suluhu Hassan
Pour la présidente Samia Suluhu Hassan, arrivée au pouvoir en mars 2021 suite au décès soudain de son prédécesseur John Magufuli, il s’agit du premier test électoral. Malgré des signes d’ouverture démocratique à ses débuts, elle fait face ces derniers mois à de vives critiques l’accusant de renouer avec les pratiques autoritaires de Magufuli.
Selon des organisations de défense des droits humains et des gouvernements occidentaux, la Tanzanie connaît un renouveau répressif en amont des élections. Ils pointent du doigt les arrestations de membres de Chadema ainsi que des enlèvements et meurtres d’opposants.
Chadema dénonce des disqualifications massives
Freeman Mbowe, président de Chadema, a déclaré que le parti comptait initialement présenter des candidats pour environ 65% des 80 430 postes d’élus locaux à pourvoir. Mais ce chiffre a été réduit à environ 33% suite à de nombreuses disqualifications pour des motifs jugés mineurs, comme des timbres manquants, des erreurs de noms ou des formulaires mal remplis.
Nous avons assisté à la disqualification de nos candidats dans un mépris flagrant des règles… c’était de la manipulation délibérée.
– Freeman Mbowe, président de Chadema
Malgré le boycott du scrutin de 2019 en raison d’irrégularités similaires, Chadema assure cette fois ne pas vouloir se retirer. Mbowe souligne que le parti ne peut pas se permettre de rester à l’écart du pouvoir local pendant 5 années supplémentaires.
Le parti au pouvoir en force, des préparatifs critiqués
De son côté, le parti au pouvoir, le Chama cha Mapinduzi (CCM), présentera des candidats pour l’ensemble des postes selon le ministre chargé de superviser les élections, Mohamed Mchengerwa. Il a indiqué que les partis d’opposition avaient obtenu des nominations à hauteur de 38% et a qualifié les préparatifs électoraux de “leçon de réussite pour les scrutins à venir”.
Pourtant, des responsables religieux ont également critiqué le processus de nomination, y voyant une violation de la volonté populaire risquant de porter atteinte à la paix. La conférence épiscopale et le conseil national musulman de Tanzanie ont appelé au respect de la justice électorale.
Des tensions qui ravivent le spectre de l’autoritarisme
Ces tensions pré-électorales font ressurgir les inquiétudes quant à une dérive autoritaire en Tanzanie. Beaucoup s’interrogent sur la capacité et la volonté de la présidente Hassan de rompre avec les pratiques de l’ère Magufuli, marquée par une répression de l’opposition et un recul des libertés.
Dans ce contexte, les élections locales du 27 novembre apparaissent comme un test crucial pour la démocratie tanzanienne. Au-delà des résultats, c’est la conduite du processus électoral dans son ensemble, de la nomination des candidats au décompte des voix, qui sera scrutée de près, tant par les acteurs nationaux qu’internationaux.
La manière dont le pouvoir en place gérera les contestations de l’opposition et les demandes de transparence sera un indicateur clé des orientations politiques du pays pour les années à venir. La Tanzanie parviendra-t-elle à organiser des élections locales inclusives et apaisées, préfigurant une présidentielle 2025 démocratique? Ou verra-t-elle ses acquis démocratiques encore érodés? Les prochaines semaines apporteront sans doute des éléments de réponse.