La situation humanitaire déjà précaire dans la bande de Gaza vient de prendre un nouveau tournant dramatique. Selon l’ONU, le pillage de l’aide destinée à la population civile palestinienne « devient systématique et doit cesser immédiatement ».
Plus de 100 camions d’aide pillés par des hommes armés
Samedi dernier, un convoi de 109 camions transportant de la nourriture pour les Gazaouis a été attaqué juste après son entrée dans le territoire palestinien, au niveau du poste frontière de Kerem Shalom. Sur la centaine de véhicules, seuls 11 sont parvenus à destination avec leur cargaison, ce qui représente « le pire » pillage en termes de volume selon l’ONU.
Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général des Nations Unies, tire la sonnette d’alarme : ces attaques contre l’aide humanitaire « deviennent plus organisées » et « plus efficaces », obstruant les opérations de secours « vitales » et mettant en danger la vie du personnel onusien sur place.
Israël soupçonné de « laisser faire » les pilleurs
Mais ce qui inquiète particulièrement l’organisation internationale, ce sont les informations faisant état d’une possible complicité passive, voire active, des forces israéliennes avec ces gangs de pilleurs. Un mémo interne cité par le Washington Post évoquerait même une « protection » apportée par l’armée de l’État hébreu à certains de ces groupes armés.
Si Stéphane Dujarric affirme ne pas avoir eu connaissance de ce document, il juge néanmoins « franchement alarmante » l’idée qu’Israël « puisse laisser faire les pilleurs ou ne fasse pas assez pour les empêcher », rappelant les responsabilités de la puissance occupante pour assurer l’acheminement sécurisé de l’aide humanitaire.
Le Hamas lance une répression sanglante contre des pilleurs présumés
De son côté, le gouvernement du Hamas qui contrôle la bande de Gaza a annoncé lundi une opération contre ces pilleurs d’aide. Celle-ci se serait soldée par la mort d’au moins 20 personnes. Une répression qualifiée de « pas la dernière » par le ministère de l’Intérieur gazaoui, mais sur laquelle l’ONU s’interroge, appelant à ce que « les opérations de maintien de l’ordre soient légales, nécessaires et proportionnées ».
Alors que la bande de Gaza, sous blocus israélien, dépend presque entièrement de l’aide internationale pour sa survie, cette nouvelle escalade dans le pillage des secours fait planer le spectre d’une aggravation dramatique de la crise humanitaire sur place. L’ONU appelle « toutes les parties » à agir pour sécuriser les convois et distributions.
Nous alertons sur ce problème des pillages armés depuis un certain temps et nous avons remarqué qu’ils deviennent plus organisés, plus efficaces.
Stéphane Dujarric, porte-parole de l’ONU
La population civile, première victime de ces pillages à répétition
Privés de l’assistance internationale dont ils dépendent, les 2 millions d’habitants de l’enclave palestinienne voient leurs conditions de vie déjà très dures se dégrader encore davantage. Les pénuries alimentaires et de produits de première nécessité s’aggravent, accentuant la malnutrition et les problèmes sanitaires.
Coincés entre blocus, conflits à répétition et maintenant pillages organisés, les civils gazaouis apparaissent comme les grands perdants de ce nouveau coup porté à l’aide humanitaire. Un énième drame qui vient noircir un peu plus le tableau déjà bien sombre de Gaza, qualifiée régulièrement de « plus grande prison à ciel ouvert au monde ».
L’aide humanitaire, un enjeu crucial et disputé
Au cœur de cette crise, l’aide humanitaire apparaît plus que jamais comme une ressource précieuse et convoitée dans un territoire dévasté par les guerres et le blocus. Sa distribution, vitale pour la population, cristallise les tensions entre Hamas, Israël et la communauté internationale.
Son acheminement est régulièrement entravé, pris en otage des rapports de force locaux et régionaux. Instrument de pression politique pour les uns, bouée de sauvetage indispensable pour les autres, l’assistance à Gaza se retrouve au centre d’une bataille dont les victimes sont invariablement les civils, premières cibles de la crise humanitaire qui perdure.
Pour l’ONU et les acteurs humanitaires, sécuriser les convois et garantir leur distribution juste et efficace à la population démunie s’impose comme un défi majeur et pressant. Un défi rendu encore plus ardu par l’instabilité chronique et les intérêts divergents des forces en présence à Gaza et ses alentours.
Gaza, une poudrière humanitaire à haut risque
Avec ce nouveau coup porté aux opérations de secours, c’est la situation déjà explosive de la bande de Gaza qui menace un peu plus de basculer. Sans amélioration rapide des conditions humanitaires, le territoire palestinien pourrait rapidement devenir le théâtre d’une nouvelle escalade de violence.
Le désespoir grandissant de la population, la frustration face à une aide détournée et une répression aveugle, sont autant d’ingrédients qui laissent craindre un embrasement potentiellement dévastateur pour les civils pris au piège. Les appels à la responsabilité et à l’action lancés par l’ONU visent à conjurer ce scénario du pire.
Mais sans un engagement ferme de toutes les parties pour permettre l’acheminement sûr et équitable de l’assistance humanitaire, Gaza risque de sombrer un peu plus dans l’abîme d’une crise aux conséquences incalculables. L’urgence est là, palpable. Il y a péril en la demeure pour les habitants de ce petit territoire meurtri, une fois de plus au bord du gouffre.