Le monde de l’art est en deuil. Giovanni Sarti, figure incontournable du marché parisien de la peinture ancienne, s’est éteint le 18 septembre dernier à l’âge de 81 ans. Antiquaire avant de devenir galeriste, cet autodidacte passionné était unanimement salué pour son œil expert, son érudition et son flair légendaire pour dénicher des œuvres rares des grands maîtres italiens.
Un parcours atypique guidé par la passion
Né en Italie, Giovanni Sarti a très tôt développé une fascination pour l’art de son pays natal. Sans formation académique, il a appris sur le terrain, guidé par sa curiosité insatiable et son sens inné de la beauté. Débutant comme antiquaire, il a rapidement acquis une réputation d’expert des primitifs italiens, ces peintres précurseurs de la Renaissance.
Sa passion l’a conduit à ouvrir sa propre galerie à Paris, devenue une référence pour les amateurs et collectionneurs du monde entier. Mais Giovanni Sarti n’était pas qu’un marchand. C’était avant tout un amoureux de l’art, toujours prêt à partager son savoir avec générosité.
Giovanni avait une connaissance encyclopédique de la peinture italienne. Il pouvait parler des heures d’un détail sur un tableau, retracer l’histoire d’une œuvre, décrypter les influences d’un artiste. C’était fascinant de l’écouter.
– Un proche collaborateur
L’œil du découvreur
Son terrain de chasse favori restait les Madones à l’enfant et les Crucifixions sur fond or du Trecento et du Quattrocento. Des œuvres dont il savait percevoir la qualité et la rareté au premier coup d’œil. Nombreux sont les tableaux oubliés ou sous-estimés qu’il a sortis de l’ombre et remis en lumière.
Selon une anecdote restée célèbre, il aurait un jour déniché une Vierge à l’Enfant inédite de Bernardo Daddi, grand maître florentin du 14e siècle, dans le grenier poussiéreux d’un manoir toscan. Une trouvaille exceptionnelle révélatrice de son flair légendaire.
Un héritage précieux
Au-delà de ce coup d’éclat, c’est tout un pan méconnu de l’histoire de l’art que Giovanni Sarti a contribué à mettre en valeur. Grâce à lui, de nombreux primitifs italiens sont sortis de l’oubli pour rejoindre de prestigieuses collections, privées comme publiques.
Son épouse Claire, fille du peintre surréaliste Gérard Vulliamy, l’a accompagné tout au long de cette quête. Ensemble, ils formaient un couple fusionnel, uni par un amour inconditionnel de l’art. La messe hommage célébrée le 15 novembre en l’église Saint-Philippe-du-Roule, à Paris, a réuni famille, amis et grande familia du monde de l’art.
Avec Giovanni, c’est une page de l’histoire du marché de l’art qui se tourne. Mais son héritage perdurera à travers les œuvres qu’il a sauvées de l’oubli et les passions qu’il a su transmettre. Il a montré que l’amour de l’art ne s’apprend pas dans les livres, mais se vit avec le cœur.
– Un confrère galeriste
Si le regard unique de ce “maestro charmant” manquera cruellement, son empreinte sur le monde de l’art, elle, est indélébile. À travers sa vie et son œuvre, Giovanni Sarti aura été un passeur, faisant le lien entre passé et présent, entre l’Italie et la France, entre les artistes oubliés et le public. Un trait d’union précieux dont l’héritage continuera d’inspirer et d’enrichir amateurs et historiens de l’art pour longtemps.