En pleine tourmente électorale, le chancelier allemand Olaf Scholz vient de jouer un coup audacieux en s’entretenant directement avec Vladimir Poutine. Un geste qui divise profondément l’opinion publique et la classe politique, à quelques mois d’élections législatives anticipées qui s’annoncent périlleuses pour le dirigeant social-démocrate.
Un appel à Poutine qui passe mal
C’est un coup de fil qui n’est pas passé inaperçu. Vendredi dernier, Olaf Scholz s’est entretenu pendant près d’une heure avec le président russe Vladimir Poutine, une première en près de deux ans. Une initiative jugée nécessaire par le chancelier pour réaffirmer le soutien indéfectible de l’Allemagne à l’Ukraine, mais qui a suscité l’ire de Kiev et de nombreux alliés.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a ainsi reproché à Olaf Scholz d’avoir ouvert la “boîte de Pandore” en dialoguant avec Moscou, tandis que le Premier ministre polonais Donald Tusk estimait que cet appel prouvait que “la diplomatie par téléphone ne peut remplacer un véritable soutien de l’ensemble de l’Occident”.
Un geste électoraliste ?
Pour beaucoup d’observateurs, cet appel à Vladimir Poutine est avant tout un geste électoraliste de la part d’un Olaf Scholz affaibli et en quête de nouveaux électeurs. En se positionnant en “chancelier de la paix”, le dirigeant espère séduire une opinion publique allemande de plus en plus inquiète de l’enlisement du conflit ukrainien.
Une stratégie risquée, alors que le gouvernement fait déjà face à des critiques sur son engagement jugé parfois trop timoré aux côtés de Kiev. Mais pour Olaf Scholz, cette main tendue à Moscou est aussi un moyen d’éviter que de futures discussions entre les présidents russe et américain ne se fassent sans qu’un pays européen majeur comme l’Allemagne n’ait son mot à dire.
La menace des extrêmes
Au-delà des critiques internationales, c’est surtout sur le plan intérieur qu’Olaf Scholz joue gros. Très affaibli depuis la rupture de sa coalition, le chancelier voit les partis des extrêmes, qui réclament un arrêt des livraisons d’armes à l’Ukraine, gagner du terrain dans les sondages.
Le parti d’extrême droite AfD est ainsi crédité de la deuxième place aux prochaines législatives, tandis qu’à gauche, le nouveau parti BSW d’une ancienne élue communiste devrait faire une entrée remarquée au Bundestag. Autant de signaux inquiétants pour Olaf Scholz, qui pourrait être tenté de donner des gages à un électorat de plus en plus critique de la politique étrangère du gouvernement.
Scholz peut-il rebondir ?
Face à cette tempête politique, Olaf Scholz tente de garder le cap. “L’Ukraine peut compter sur nous” et “aucune décision ne sera prise par-dessus la tête de l’Ukraine”, a-t-il martelé avant de s’envoler pour le sommet du G20. Le chancelier a également exclu toute discussion de paix sans accord préalable de Kiev.
Mais dans son propre camp, les doutes s’accumulent sur sa capacité à inverser la tendance. Selon plusieurs médias, de plus en plus de voix s’élèvent au sein du SPD pour que le populaire ministre de la Défense Boris Pistorius prenne la tête de liste à la place d’Olaf Scholz.
Le chancelier, lui, veut croire en ses chances. “Le SPD et moi-même sommes prêts à nous engager dans cette bataille – d’ailleurs avec l’objectif de gagner”, a-t-il assuré. Reste à savoir si cet optimisme affiché suffira face à une opinion publique de plus en plus volatile. Car au final, c’est bien dans les urnes que se jouera l’avenir politique d’Olaf Scholz et de son pari diplomatique.