Samedi, les abords de la conférence du parti travailliste gallois à Llandudno ont été le théâtre d’une manifestation peu ordinaire. Environ 200 agriculteurs, accompagnés de leurs fidèles tracteurs et autres véhicules agricoles, se sont rassemblés pour exprimer leur mécontentement face à la nouvelle taxe sur la succession des propriétés agricoles annoncée par le gouvernement le mois dernier. L’atmosphère était tendue et les slogans sans équivoque : “Les taxes des travaillistes = pénurie alimentaire”, pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants.
Une Taxe Qui Passe Mal
Au cœur de la polémique, la taxe sur la succession présentée par le gouvernement travailliste lors de son premier budget depuis son arrivée au pouvoir en juillet. Cette mesure controversée prévoit de taxer les exploitations agricoles d’une valeur supérieure à un million de livres sterling, soit environ 1,20 million d’euros.
Si le Trésor assure que la plupart des agriculteurs, environ les trois quarts, ne seront pas concernés, les principaux intéressés s’appuient eux sur des chiffres du ministère des Affaires rurales selon lesquels 66% des entreprises agricoles dépasseraient ce fameux seuil du million de livres. De quoi semer le trouble et la colère dans le monde agricole gallois et britannique.
Keir Starmer Interpellé
Présent à la conférence du parti travailliste gallois, le Premier ministre Keir Starmer a soigneusement évité le sujet épineux de la taxe dans son discours. Il s’est contenté d’affirmer qu’il défendrait “les décisions difficiles” prises par son gouvernement “pour stabiliser l’économie”. Une déclaration qui n’a visiblement pas convaincu les agriculteurs, bien décidés à se faire entendre.
Les manifestants ont d’ailleurs prévu de remettre une lettre au dirigeant, commençant par les mots “Ne mordez pas la main qui vous nourrit”. Un message on ne peut plus clair, reflétant l’inquiétude et l’exaspération de toute une profession qui se sent menacée.
“Une Industrie Déjà à Genoux”
Pour Gareth Wyn Jones, agriculteur et YouTuber gallois, le gouvernement est tout simplement “en train de détruire une industrie qui est déjà à genoux”. Interviewé par Sky News, il a lancé un appel à l’aide :
Nous avons besoin du soutien du gouvernement, pas de plus d’entraves, afin de pouvoir produire des denrées alimentaires pour nourrir la nation.
Un cri du cœur qui en dit long sur le malaise ambiant. Les agriculteurs du Royaume-Uni ne comptent d’ailleurs pas en rester là. Une grande manifestation est prévue mardi à Londres, preuve s’il en fallait que la mobilisation ne faiblit pas.
L’Avenir de l’Agriculture Britannique en Question
Au-delà de l’aspect fiscal, c’est toute la question de la pérennité et de la transmission des exploitations agricoles qui est posée. Avec cette nouvelle taxe, de nombreux agriculteurs craignent de ne plus pouvoir léguer leur outil de travail à leurs enfants, mettant en péril la survie de fermes souvent transmises de génération en génération.
La manifestation de samedi n’est que la partie émergée d’un profond malaise qui touche le monde agricole britannique. Entre Brexit, pandémie, guerre en Ukraine et inflation galopante, les agriculteurs font face à des défis sans précédent. Beaucoup ont le sentiment d’être les grands oubliés, sacrifiés sur l’autel de décisions politiques et économiques qui les dépassent.
Le gouvernement de Keir Starmer saura-t-il entendre la détresse de ces hommes et de ces femmes qui nourrissent le pays ? La balle est désormais dans son camp. Les semaines et les mois à venir seront décisifs pour l’avenir de l’agriculture britannique et de ceux qui la font vivre, souvent dans l’ombre et la difficulté. Une chose est sûre : les tracteurs de la colère sont loin d’avoir fini de vrombir.