C’est une crise majeure qui secoue en ce moment le gouvernement des Pays-Bas. Alors que le pays fait face à une montée des tensions sur fond de violences et de racisme, l’exécutif pourrait bien imploser. Au cœur du séisme politique : la secrétaire d’État aux Finances Nora Achahbar, membre du parti anticorruption NSC, qui menace de claquer la porte. En cause, des propos jugés racistes tenus par certains de ses collègues lors d’un Conseil des ministres houleux cette semaine.
Le premier acte de ce psychodrame gouvernemental remonte à la semaine dernière. Dans la nuit du 7 au 8 novembre, des incidents éclatent à Amsterdam en marge d’un match de Ligue Europa opposant l’Ajax à l’équipe israélienne du Maccabi Tel-Aviv. Des supporteurs de l’équipe visiteuse sont pourchassés et passés à tabac par des individus dans les rues de la capitale néerlandaise. Un évènement qui choque le pays et enflamme le débat politique.
Propos polémiques et menace de démission
Lundi, la tension est palpable lors de la réunion hebdomadaire du gouvernement. D’après des sources concordantes, le ton est vite monté entre les différentes sensibilités composant cette coalition hétéroclite menée par la droite dure et l’extrême droite. Au cœur du problème : des déclarations du député Geert Wilders, chef de file du Parti pour la Liberté (PVV). Cet allié encombrant du Premier ministre aurait en effet imputé les violences anti-israéliennes aux “musulmans” et aux “Marocains”. Des propos qui ne passent pas au sein de l’aile gauche de la coalition.
C’est notamment le cas de Nora Achahbar. Cette quadragénaire d’origine marocaine, secrétaire d’État aux Finances, n’a pas mâché ses mots face à ce qu’elle considère être des “propos racistes”. Selon plusieurs médias, la ministre se serait dressée contre ces déclarations indignes lors de la réunion, menaçant de quitter le gouvernement. Une démission qui pourrait bien faire boule de neige au sein de sa formation politique, le NSC.
Le NSC au bord de la rupture
Avec ses 20 députés, ce parti anticorruption est un partenaire clé de la coalition au pouvoir. Sans lui, le gouvernement perd sa majorité au Parlement. Une épée de Damoclès brandie par la cheffe du groupe parlementaire NSC, Nicolien van Vroonhoven. “Nous verrons si le NSC souhaite continuer à faire partie de la coalition gouvernementale”, a-t-elle déclaré à la presse, soulignant que la démission probable de Nora Achahbar était “un coup dur pour le parti”. Une sortie qui sonne comme un ultimatum adressé au Premier ministre.
Face à cette menace, Dick Schoof tente tant bien que mal de sauver son attelage gouvernemental. Une réunion de crise s’est tenue ce vendredi à La Haye entre les leaders des partis de la coalition. Objectif : apaiser les esprits et colmater les brèches, alors que d’autres démissions pourraient suivre celle de la secrétaire d’État aux Finances. Un véritable casse-tête pour le locataire du Torentje, la résidence officielle du chef du gouvernement néerlandais.
Regain des tensions communautaires
Au-delà des remous politiques, cette crise gouvernementale met en lumière un climat délétère aux Pays-Bas. Les violences visant les supporteurs israéliens et les réactions qu’elles ont suscitées illustrent la polarisation croissante de la société. Les actes antisémites, les discours islamophobes et les attitudes anti-arabes sont autant de symptômes d’un malaise profond au sein du “pays de la tolérance”. Un phénomène avivé par la montée de l’extrême droite sur la scène politique nationale.
Face à ces tensions, le Premier ministre avait annoncé cette semaine des “mesures radicales” pour combattre l’antisémitisme dans le pays. Mais encore faut-il que son gouvernement survive à cette énième crise. L’issue des tractations en cours à La Haye dira si ces bonnes intentions se concrétisent… ou si elles partent en fumée avec une coalition réduite en cendres par ses propres démons.