Les tensions autour du programme nucléaire iranien atteignent leur paroxysme alors que le chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, est arrivé mercredi soir à Téhéran pour des pourparlers cruciaux. Ces entretiens représentent potentiellement l’une des dernières chances pour la diplomatie avant le retour à la Maison Blanche de Donald Trump, partisan d’une ligne dure envers l’Iran.
L’Iran au cœur des tensions internationales
Depuis plusieurs années, le programme nucléaire iranien cristallise les tensions avec les pays occidentaux. Malgré l’accord historique conclu à Vienne en 2015, qui prévoyait un allègement des sanctions en échange de garanties sur le caractère pacifique des activités nucléaires iraniennes, la méfiance persiste des deux côtés.
Le retrait unilatéral des États-Unis de l’accord sous la présidence de Donald Trump en 2018, suivi du rétablissement de lourdes sanctions contre Téhéran, a considérablement aggravé la situation. En réaction, l’Iran a progressivement augmenté ses réserves d’uranium enrichi bien au-delà des limites fixées par l’accord de 2015.
Une course contre la montre pour la diplomatie
C’est dans ce contexte de vives tensions que Rafael Grossi, le directeur général de l’AIEA, est arrivé à Téhéran pour des discussions de haut niveau avec les responsables iraniens. L’enjeu est de taille : éviter une escalade qui pourrait mener à un affrontement aux conséquences imprévisibles.
Ce sont les États-Unis, pas l’Iran, qui ont quitté l’accord
Fatemeh Mohajerani, porte-parole du gouvernement iranien
Pour Téhéran, la responsabilité de la crise incombe avant tout à Washington. La porte-parole du gouvernement iranien, Fatemeh Mohajerani, a ainsi rappelé mercredi que « ce sont les États-Unis, pas l’Iran, qui ont quitté l’accord », estimant que la politique de « pression maximale » menée par Donald Trump « ne fonctionnait pas ».
Israël menace de frappes contre les sites nucléaires iraniens
La visite de Rafael Grossi intervient également dans un contexte régional explosif. Le nouveau ministre israélien de la Défense a prévenu ces derniers jours que l’Iran était « plus exposé que jamais à des frappes sur ses installations nucléaires ». Une menace qui fait suite à des échanges de tirs de missiles entre les deux ennemis au Moyen-Orient.
Selon des experts, les marges de manœuvre pour éviter une escalade militaire se réduisent dangereusement. Ali Vaez, spécialiste de l’Iran au sein du centre de réflexion Crisis Group, a ainsi déclaré à l’AFP qu’il était « impératif de trouver des moyens pour arriver à des solutions diplomatiques ».
L’Iran dispose de « matières nucléaires » préoccupantes selon l’AIEA
Rafael Grossi a par ailleurs tiré la sonnette d’alarme concernant les activités nucléaires iraniennes. Dans un entretien accordé à la chaîne américaine CNN, il a révélé que les Iraniens « disposent d’un nombre important de matières nucléaires qui pourraient être utilisées pour fabriquer une arme nucléaire », tout en précisant qu’ils « n’ont pas d’arme nucléaire à ce stade ».
Ces inquiétudes sont renforcées par la réduction drastique des inspections des sites nucléaires iraniens depuis 2021. Téhéran a en effet débranché des caméras de surveillance et retiré l’accréditation d’un groupe d’experts de l’AIEA, compliquant considérablement la tâche des inspecteurs internationaux.
Un programme nucléaire aux origines anciennes
Le programme nucléaire iranien n’est pas un sujet nouveau. Ses bases remontent à la fin des années 1950, lorsque les États-Unis avaient signé un accord de coopération civile avec le Shah d’Iran. En 1970, l’Iran avait également ratifié le Traité de non-prolifération (TNP), s’engageant à placer ses activités nucléaires sous le contrôle de l’AIEA.
Mais au fil des années et des tensions géopolitiques, la question de l’arme atomique s’est progressivement imposée dans le débat iranien. Plusieurs responsables se sont publiquement interrogés sur l’utilité d’un tel armement comme outil de dissuasion face à Israël.
L’ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de la révolution islamique et ultime décideur sur les questions nucléaires, a toutefois émis une fatwa (décret religieux) interdisant la possession, la fabrication et l’utilisation d’armes atomiques. Mais le doute persiste quant à sa valeur contraignante.
Vers une sortie de crise ou une confrontation ?
Les discussions qui s’ouvrent à Téhéran entre Rafael Grossi et les autorités iraniennes s’annoncent donc cruciales pour l’avenir du dossier nucléaire. Leur échec pourrait précipiter la région dans une spirale dangereuse, alors que le retour attendu de Donald Trump à la Maison Blanche laisse présager un durcissement de la position américaine.
Face à ces défis, la communauté internationale retient son souffle. Une diplomatie patiente et créative sera plus que jamais nécessaire pour désamorcer les tensions et préserver la paix dans une région déjà lourdement éprouvée par les conflits. Les prochains jours seront décisifs pour savoir si une issue pacifique est encore possible, ou si l’épreuve de force semble inévitable.