Imaginez pouvoir prédire une éruption volcanique plusieurs semaines à l’avance. Cette perspective, longtemps considérée comme un rêve par les volcanologues, pourrait bientôt devenir réalité grâce à une découverte majeure sur le fonctionnement interne des volcans.
Le réveil du géant hawaïen Mauna Loa
Tout a commencé avec le réveil du Mauna Loa, le plus grand volcan actif du monde, situé sur l’île d’Hawaï dans le Pacifique. Après 38 ans de sommeil ponctués de périodes d’agitation, il est entré en éruption le 27 novembre 2022 pour 13 jours spectaculaires.
Mais ce qui a vraiment intrigué les chercheurs, c’est ce qui s’est passé dans les entrailles du volcan juste avant son réveil. Grâce à une technique appelée “chronométrie de diffusion”, ils ont pu retracer le parcours du magma dans les profondeurs.
La migration révélatrice du magma
Les résultats sont édifiants : dans les deux mois précédant l’éruption, une grande quantité de magma a migré depuis une profondeur de 3 à 5 km jusqu’à un réservoir situé seulement 1 à 2 km sous la caldeira. Cette arrivée massive a fait monter la pression, jusqu’au point de rupture.
Des signes avant-coureurs de cette migration avaient bien été enregistrés par les instruments de surveillance, comme une activité sismique accrue et une déformation du sol. Mais c’est l’étude de la “tuyauterie interne” du volcan qui a permis de préciser l’origine et la destination de ce magma en mouvement.
Comprendre le rythme de transport du magma apporte de la clarté aux interprétations des données de surveillance en temps réel.
Kendra Lynn, volcanologue à l’USGS
Vers une meilleure prévision des éruptions
Cette découverte ouvre des perspectives enthousiasmantes pour anticiper les futures éruptions du Mauna Loa, mais pas seulement. En étudiant les éruptions passées de différents volcans, les chercheurs espèrent identifier des schémas récurrents et des déclencheurs communs.
À terme, il serait possible de classer les volcans en fonction du rythme de transport de leur magma, afin de mieux évaluer les risques. Une voie passionnante quand on sait que plus de 29 millions de personnes vivent à moins de 10 km d’un des 1500 volcans actifs dans le monde.
Avec un nombre suffisant d’études, on pourrait faire progresser notre compréhension des volcans dans le monde.
Kendra Lynn
Un enjeu crucial de sécurité publique
Du Vésuve en Italie à la Montagne Pelée en Martinique, de nombreux volcans sous haute surveillance côtoient des zones densément peuplées. Pouvoir distinguer les signes d’une éruption imminente de simples périodes d’agitation est un défi majeur pour les autorités.
Jusqu’à présent, les éruptions potentiellement dévastatrices ne peuvent être prévues que quelques jours voire quelques heures à l’avance. Un délai souvent trop court pour organiser des évacuations de masse en toute sécurité.
Si les avancées permises par l’analyse du Mauna Loa se confirment, elles pourraient à terme sauver des milliers de vies. Une lueur d’espoir émanant des profondeurs incandescentes des volcans les plus menaçants de la planète.