Sous la pression croissante de l’Union Européenne, Meta, le géant américain propriétaire de Facebook et Instagram, a annoncé un changement majeur dans son modèle publicitaire pour ses utilisateurs européens. Dans un communiqué publié mardi, le groupe a déclaré qu’il allait proposer une option de publicités « moins personnalisées » sur ses plateformes phares dans l’UE.
Cette évolution intervient alors que Meta est soupçonné d’enfreindre les règles européennes sur la protection des données personnelles. Le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), entré en vigueur en 2018, impose des obligations strictes aux entreprises en matière de collecte et d’utilisation des informations privées des internautes.
Un choix entre deux types de publicités
Désormais, les utilisateurs européens de Facebook et Instagram auront le choix entre deux options de ciblage publicitaire :
- Des publicités personnalisées, reposant sur leurs données personnelles.
- Des publicités « moins personnalisées », basées uniquement sur le contexte de navigation et un ensemble minimal de données (âge, localisation, genre).
Cette dernière option se veut plus respectueuse de la vie privée, en limitant l’exploitation des informations individuelles à des fins de ciblage marketing. Meta souligne que ces publicités contextuelles seront affichées en fonction de ce qu’un utilisateur consulte lors d’une session particulière sur ses réseaux sociaux.
Un compromis entre respect de la vie privée et modèle économique
Cette initiative de Meta apparaît comme une tentative de concilier les exigences réglementaires européennes avec son modèle économique basé sur la publicité ciblée. En effet, le groupe tire l’essentiel de ses revenus de la monétisation des données utilisateurs pour proposer des annonces ultra-personnalisées aux annonceurs.
Malgré nos efforts concertés pour nous conformer à la réglementation européenne, nous avons continué à recevoir des demandes supplémentaires de la part des régulateurs qui vont au-delà de ce qui est écrit dans la loi.
Meta, dans son communiqué
Le géant technologique regrette ces pressions accrues qui l’ont poussé à revoir son système publicitaire. Il avait déjà dû instaurer fin 2023 un abonnement payant sans publicité dans l’UE pour tenter de se conformer au RGPD et au Digital Markets Act (DMA), le nouveau règlement sur les marchés numériques.
Une décision saluée par les défenseurs de la vie privée
Du côté des régulateurs et défenseurs de la confidentialité des données, cette évolution est accueillie positivement. Anu Talus, présidente du Comité européen de la protection des données (EDPB), s’est réjouie sur LinkedIn que « des publicités moins invasives sont une excellente nouvelle ».
Elle rappelle que l’EDPB avait critiqué en avril l’option d’abonnement payant sans pub de Meta, estimant que la protection de la vie privée était « un droit fondamental » et non un privilège monnayable. La responsable salue donc le fait qu’une « plateforme importante annonce qu’elle offrira un nouveau choix gratuitement avec un profilage moins détaillé pour la publicité ».
Des zones d’ombre persistent
Malgré ces avancées, des doutes subsistent quant à la conformité totale de Meta aux règles européennes. Fin juillet, le réseau des autorités de protection des consommateurs de l’UE avait écrit au groupe pour exiger des explications sur son modèle d’abonnement payant, soupçonné de tromper les internautes.
De plus, le fait que les utilisateurs optant pour les publicités moins personnalisées ne pourront pas passer certaines annonces interroge. Ces publicités resteront affichées pendant quelques secondes, ce qui peut s’apparenter à une forme de pression pour inciter à accepter plus de ciblage.
La route vers un équilibre entre respect de la vie privée et publicité digitale semble encore longue. Mais cette décision de Meta marque une étape importante, reflétant l’influence croissante de la réglementation européenne sur les pratiques des géants technologiques. L’avenir dira si ces ajustements sont suffisants ou si de nouvelles frictions sont à prévoir entre l’UE et les Gafam.