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Un Décret Choc Pour Les Soins Des Mineurs Au Tennessee

🚫 Le Tennessee adopte une loi choc pénalisant les adultes aidant les mineurs à avorter ou à recevoir des soins d'affirmation de genre sans l'accord des parents. Un décret polémique qui ouvre le débat. #Législation #SantéMineurs #DroitsReproductifs

Alors que le débat sur les droits reproductifs et l’accès aux soins pour les mineurs continue de diviser l’opinion, le Tennessee vient de franchir un nouveau cap avec l’adoption d’une législation des plus controversées. Le gouverneur républicain Bill Lee a en effet approuvé mardi dernier deux projets de loi visant à pénaliser les adultes qui aideraient des mineurs à obtenir une IVG ou à bénéficier de traitements affirmant leur identité de genre, et ce sans le consentement de leurs parents ou tuteurs légaux. Une décision choc qui risque bien de provoquer un séisme politique et sociétal dans cet État conservateur du Sud des États-Unis.

Une double offensive législative

Fidèle à sa ligne politique, le gouverneur Bill Lee, connu pour ses positions anti-avortement et son opposition aux soins de transition pour les jeunes transgenres, a apposé sa signature sur ces deux textes sans faire de commentaire public. Baptisés respectivement HB 2416 et SB 1027, ils prévoient de lourdes sanctions à l’encontre de toute personne majeure qui apporterait une aide substantielle à un.e mineur.e pour mettre fin à une grossesse ou entamer un parcours médical de transition, à l’insu de ses responsables légaux.

Concrètement, les individus reconnus coupables de tels actes s’exposeraient à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an, assortie d’une amende. Seules quelques exceptions sont prévues, notamment pour le personnel médical d’urgence. Mais globalement, c’est toute une chaîne de “complicités” potentielles qui est visée :

  • Le simple fait d’informer un.e adolescent.e sur les ressources disponibles en matière d’IVG
  • L’accompagnement physique vers une clinique pratiquant l’avortement, y compris le covoiturage
  • Le conseil et l’orientation vers des professionnels de santé compétents pour les questions de genre
  • L’aide matérielle, financière ou psychologique apportée à un.e mineur.e transgenre

Autant de situations du quotidien qui pourraient donc valoir à un proche, un enseignant ou un soignant une condamnation pénale, dès lors qu’elles interviennent en dehors du cadre familial. Une épée de Damoclès qui plane désormais sur toutes celles et ceux qui voudraient tendre la main à ces jeunes en quête d’écoute et d’autonomie.

Le Tennessee, fer de lance de la “guerre culturelle”

Avec ce nouveau coup de force, le Tennessee s’impose un peu plus comme l’un des États les plus restrictifs du pays en matière de droits reproductifs et de reconnaissance des identités de genre. Rappelons qu’il a déjà adopté l’an dernier une interdiction quasi totale de l’avortement, y compris en cas de viol ou d’inceste, avec des exceptions très limitées pour préserver la vie de la mère. Parallèlement, le gouverneur Lee a multiplié les offensives contre la communauté trans, bannissant les traitements hormonaux et chirurgicaux pour les mineurs, interdisant aux personnes transgenres de participer aux sports scolaires et universitaires dans la catégorie de leur choix, ou encore autorisant les commerces à refuser de servir cette clientèle au nom de la “liberté religieuse”.

Une politique ultra-conservatrice qui s’inscrit pleinement dans la “guerre culturelle” qui fait rage aux États-Unis, attisée par l’aile droite du parti républicain. Après la révocation de l’arrêt Roe v. Wade par la Cour suprême en juin 2022, c’est une véritable déferlante de lois anti-IVG qui a submergé les États les plus “rouges”, du Texas à la Floride en passant par l’Oklahoma. Dans le même temps, les attaques contre les droits LGBTQ+ se sont intensifiées, ciblant tout particulièrement les personnes trans et leur accès aux soins. Un climat de plus en plus oppressant et anxiogène pour toutes celles et ceux qui ne rentrent pas dans le moule d’une Amérique puritaine et traditionaliste.

Des lois “extrêmes” et “dangereuses” pour les défenseurs des droits

Sans surprise, ce nouveau train de mesures a suscité l’indignation des organisations de défense des droits reproductifs et LGBTQ+, qui y voient une atteinte intolérable à la santé et à la dignité des jeunes concerné.e.s. Dans un communiqué, Ashley Coffield, la directrice de Planned Parenthood pour le Tennessee et le Mississippi, a qualifié ces lois d'”extrêmes” et “dangereuses”, fustigeant une nouvelle tentative d’imposer “la vision étroite d’extrémistes politiques” au détriment du bien-être des patient.e.s. De son côté, l’ACLU a d’ores et déjà fait savoir qu’elle entendait contester ces textes en justice, pointant leur “inconstitutionnalité” et leur caractère “terriblement vague”.

Ces lois ne visent qu’à stigmatiser et isoler encore davantage les jeunes vulnérables, en les privant d’un réseau de soutien essentiel. C’est cruel et contre-productif.

Henry Seaton, porte-parole de la Tennessee ACLU

Du côté des républicains, on assume pleinement ce nouveau coup de force, présenté comme une mesure de “bon sens” visant à protéger les mineurs et à réaffirmer l’autorité parentale. La sénatrice Ferrell Haile, co-autrice du projet de loi sur les soins trans, a ainsi déclaré vouloir “laisser le temps aux enfants d’être des enfants”, sans qu’ils soient “poussés à prendre des décisions qui changeront leur vie à jamais”. Un argument repris par de nombreux élus conservateurs, qui agitent le spectre d’une “contagion sociale” et d’une influence néfaste de la “théorie du genre” sur une jeunesse prétendument manipulable.

Les ados transgenres et les mineures enceintes, principales victimes

Au-delà de la bataille idéologique, ce sont bien sûr les jeunes directement concernés qui risquent de payer le plus lourd tribut de cette escalade répressive. En les privant d’accès à des soins adaptés et confidentiels, en les contraignant à solliciter un accord parental souvent inenvisageable, ces lois les placent dans une situation intenable, avec des conséquences potentiellement dévastatrices pour leur santé mentale et physique.

Pour un.e ado transgenre en plein questionnement sur son identité, se voir refuser un traitement hormonal ou un accompagnement psychologique peut être vécu comme un déni d’existence insoutenable, avec un risque accru de dépression, d’auto-mutilation voire de suicide. Quant aux mineures enceintes à la suite d’un viol ou d’un inceste, l’obligation d’obtenir le consentement de leur agresseur pour avorter relève purement et simplement de la torture psychologique. Autant de scénarios glaçants qui pourraient se multiplier si ces lois venaient à entrer en vigueur.

Je suis terrifié à l’idée que mes patients ne puissent plus venir me voir en toute confidentialité. Certains ont des parents violents, d’autres ont été mis à la porte… Leur couper ce lien de confiance, c’est les mettre encore plus en danger.

Dr. Thomas Lewis, pédiatre et endocrinologue à Memphis

Face à cette vague répressive sans précédent, les associations de terrain tentent tant bien que mal de s’adapter et d’élaborer des stratégies de résistance. Mais dans ce Tennessee de plus en plus verrouillé, où dénoncer la discrimination anti-LGBTQ+ à l’école est désormais passible de poursuites, leur marge de manœuvre apparaît chaque jour plus réduite. Pour les milliers d’ados directement menacés par ces lois liberticides, l’horizon s’assombrit dangereusement, sans autre alternative que le renoncement à leurs droits fondamentaux, l’exil vers un État plus progressiste ou la clandestinité. Un terrible retour en arrière qui en dit long sur la dérive réactionnaire de l’Amérique trumpiste.

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