Une décision judiciaire russe fait polémique : deux trafiquants de drogue présumés ont été relâchés pour aller combattre en Ukraine. Cette mesure, rendue possible par une loi promulguée en octobre 2023 par le président Vladimir Poutine, soulève de nombreuses questions éthiques et légales.
Une Liberté Au Prix Du Combat
Selon le tribunal de Saint-Pétersbourg, Alexandre Markov et Dmitri Antipov, arrêtés en février 2023 avec 200 kg de cocaïne, ont vu leurs poursuites suspendues après avoir signé un contrat militaire. Ils risquaient entre 8 et 20 ans de prison, mais ont finalement rejoint une compagnie d’assaut sur le front ukrainien.
Cette pratique, qui concernait déjà 42 personnes dans cette seule juridiction au 8 novembre, s’est étendue à d’autres régions russes. A Krasnodar, un accusé de meurtre en réunion a ainsi donné “son accord bénévole pour partir se battre” en échange de sa libération.
Un Précédent Inquiétant
Bien avant cette loi, le groupe paramilitaire Wagner avait déjà recruté des milliers de détenus, leur promettant une amnistie après six mois au front. Si cette pratique avait ensuite été interdite, la nouvelle législation semble lui redonner une base légale, désormais étendue aux simples suspects.
En promulguant cette loi, Poutine a créé une armée parallèle de criminels et de prévenus, prêts à tout pour échapper à la justice. C’est une véritable bombe à retardement pour notre société.
Un juriste russe souhaitant rester anonyme
Une Justice À Deux Vitesses
Pour beaucoup d’observateurs, ces libérations témoignent d’une justice expéditive, prête à passer l’éponge sur des crimes graves pour servir l’effort de guerre. Une situation qui transforme les criminels en héros et la prison en bureau de recrutement.
Mais au-delà de l’aspect éthique, c’est la fiabilité même de ces “soldats d’occasion” qui est en cause. Quelles garanties sur leur loyauté, leur discipline, quand leur seule motivation est d’échapper aux poursuites ?
L’Ukraine, Un Nouveau Far-West ?
Plus grave encore, certains craignent que ces criminels n’importent leurs méthodes et réseaux illégaux sur les territoires ukrainiens qu’ils sont censés libérer. Un risque de voir le conflit servir de terreau à une nouvelle criminalité transfrontalière.
Avec ces libérations, Poutine non seulement vide ses prisons, mais exporte en plus le crime organisé en Ukraine. Un véritable cadeau empoisonné pour l’après-guerre.
Un expert de la criminalité russe
Une Pratique Appelée À Se Poursuivre
Malgré ces craintes légitimes, tout porte à croire que ces enrôlements controversés vont se multiplier. Avec des pertes militaires russes qui s’accumulent et une opinion publique de plus en plus réticente à l’envoi de nouvelles recrues, le Kremlin pourrait être tenté de puiser davantage dans ses viviers carcéraux.
Une dérive inquiétante, qui risque non seulement de décrédibiliser la justice russe, mais aussi de saper durablement les efforts de stabilisation en Ukraine. Car en envoyant ses criminels sur le front, Moscou pourrait bien semer les graines des guerres de demain.