Les forces de l’ordre ont porté un coup sévère aux narcotrafiquants marseillais en début de semaine. Selon des sources proches de l’enquête, pas moins de 15 personnes ont été interpellées et près de 1,2 million d’euros ont été saisis dans le cadre d’une vaste opération anti-drogue. Cette action d’envergure marque-t-elle un tournant dans la lutte contre les trafics à Marseille ?
Une enquête minutieuse sur les flux financiers des trafiquants
Cette opération de police est l’aboutissement d’un long travail d’enquête démarré à l’été 2023 par le parquet de Marseille. Les investigations, menées par l’antenne marseillaise de l’Office antistupéfiants (Ofast), se sont concentrées sur les flux financiers des trafiquants plutôt que sur les produits stupéfiants eux-mêmes. Un changement de paradigme qui s’est avéré payant.
Dès septembre 2023, cette nouvelle approche avait permis la saisie de 43 kg de cocaïne, de plus de 50 000 euros en liquide et la mise en examen de trois personnes. Mais le trafic a persisté malgré ces arrestations, poussant les enquêteurs à creuser davantage.
Un système sophistiqué de blanchiment d’argent
L’enquête a mis au jour un système très élaboré et lucratif de collecte des profits du trafic de drogue. Plusieurs fois par semaine, des “mules” sillonnaient la France au volant de véhicules spécialement équipés de caches pour récupérer des sacs remplis de billets. Chaque sac contenait au minimum plusieurs centaines de milliers d’euros.
Cet argent sale était ensuite centralisé en région parisienne, avant d’être blanchi via un réseau de sociétés écrans. Un procédé bien rodé qui permettait aux trafiquants de réinjecter rapidement leurs profits dans l’économie légale.
La DZ Mafia et le clan de la Castellane ciblés
Parmi les 15 personnes interpellées lundi figurent 5 marseillais et 2 individus interceptés dans le Vaucluse avec près de 1,2 million d’euros cachés dans leur fourgon. Huit autres hommes ont été arrêtés en Île-de-France dans le cadre de cette opération.
Les trafiquants sur certains gros points de vente peuvent gagner jusqu’à 150 000 euros par mois. Leur volonté est de réinjecter cet argent au plus vite.
– Un magistrat de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Marseille
Ce coup de filet cible en particulier la “DZ Mafia” et le clan de la Castellane, deux organisations criminelles qui règnent sur de nombreux points de deal marseillais. Un nouveau coup dur pour ces réseaux, déjà fragilisés par de précédentes opérations.
La police s’attaque au “nerf de la guerre”
En s’attaquant directement aux finances des trafiquants, les forces de l’ordre visent le “nerf de la guerre”. L’objectif est de tarir les revenus générés par les trafics pour démanteler durablement ces réseaux tentaculaires.
- La saisie de 1,2 million d’euros porte un coup dur aux narcotrafiquants
- Priver les trafiquants de leurs profits est essentiel pour les affaiblir
- Le blanchiment permet de réinjecter l’argent de la drogue dans l’économie légale
Pour un magistrat spécialisé dans la lutte anti-drogue, interrogé par un grand quotidien national, cette stratégie est payante sur le long terme. En asséchant les finances des trafiquants, la police les prive des moyens nécessaires pour acquérir de nouveaux produits stupéfiants et corrompre leur entourage.
Marseille, plaque tournante du trafic de drogue en France
Cette opération d’envergure rappelle le triste statut de Marseille en matière de trafic de drogue. La cité phocéenne reste une plaque tournante des stupéfiants en France, concentrant réseaux d’approvisionnement et points de deal.
Malgré les nombreuses opérations anti-drogue menées ces dernières années, le trafic perdure et s’adapte. Les saisies records de cocaïne au port de Marseille illustrent l’ampleur du phénomène :
- 2020 : 1,4 tonne
- 2021 : 6,2 tonnes
- 2022 : 2,4 tonnes
- 2023 : 3,9 tonnes
Face à ce fléau, policiers, magistrats et douaniers se mobilisent au quotidien. Mais la tâche est immense tant les ramifications des réseaux criminels sont profondes. Il faudra sans doute encore de nombreux coups de filet comme celui-ci pour espérer inverser la tendance.
Une lutte sans fin contre l’hydre du trafic de drogue ?
Si cette opération marque une victoire indéniable dans la lutte contre le trafic de drogue, la guerre est encore loin d’être gagnée. Comme une hydre dont les têtes repoussent sans cesse, les réseaux criminels s’adaptent et se renouvellent après chaque coup dur.
Les enquêteurs en sont bien conscients. Ils savent que d’autres trafiquants prendront la place de ceux qui ont été arrêtés. Mais chaque bataille remportée affaiblit un peu plus l’emprise des narcotrafiquants sur la ville. Un combat de longue haleine, qui nécessite détermination et persévérance.
La lutte contre les trafics de stupéfiants est un travail de fourmi. Il faut sans cesse remettre l’ouvrage sur le métier. Mais chaque opération compte, chaque saisie est une victoire.
– Un enquêteur de l’Office antistupéfiants
Au-delà de la répression, c’est aussi tout un travail de prévention et d’éducation qui doit être mené dans les quartiers les plus touchés par ce fléau. Car si l’argent facile du trafic attire de nombreux jeunes, il ne mène qu’à l’impasse de la violence et de la prison.
L’opération coup de poing menée début novembre à Marseille est donc à saluer. Mais il faudra encore de nombreuses actions de ce type, couplées à des politiques sociales ambitieuses, pour espérer un jour venir à bout de l’hydre du trafic de drogue. Un combat difficile et de longue haleine, mais nécessaire pour l’avenir de la cité phocéenne et de ses habitants.