Malgré les revers juridiques, l’Italie persiste dans sa politique controversée de débarquement de migrants en Albanie. Vendredi, huit nouveaux migrants ont été débarqués dans le port albanais de Shengjin, dans le cadre de l’accord entre Rome et Tirana. Une procédure qui ne fait pas l’unanimité, y compris dans la justice italienne.
Un nouvel épisode dans la saga des renvois
Ce nouveau débarquement intervient près d’un mois après le renvoi en Italie de douze migrants précédemment transférés en Albanie. Un tribunal italien avait en effet jugé la procédure non conforme au droit européen, s’appuyant sur une décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE). Selon celle-ci, les pays de l’UE ne peuvent pas décréter un pays entier comme sûr si certaines régions de celui-ci ne le sont pas.
Le gouvernement italien tente de contourner la justice
Déterminé à poursuivre sa politique, le gouvernement ultraconservateur de Giorgia Meloni a adopté un nouveau décret listant comme sûres toutes les régions des 19 pays d’origine figurant sur sa liste des “pays sûrs”. L’objectif : traiter les demandes d’asile de ces ressortissants en procédure accélérée depuis l’Albanie, avec de probables expulsions à la clé.
Mais là encore, des juges italiens contestent ce texte et ont saisi la CJUE. Ils estiment impossible de déclarer des pays entiers sûrs lorsqu’il existe des preuves de persécution de minorités. Un paradoxe soulevé avec force :
On pourrait dire, paradoxalement, que l’Allemagne nazie était un pays extrêmement sûr pour la grande majorité de la population allemande : à l’exception des juifs, des homosexuels, des opposants politiques, des personnes d’origine rom et d’autres groupes minoritaires.
Juges de Bologne ayant saisi la CJUE
Une politique symbolique face aux arrivées de migrants
Malgré les obstacles juridiques, le gouvernement Meloni maintient le cap de sa politique migratoire restrictive. La Première ministre assure qu’il reste “un extraordinaire intérêt de la part de [ses] partenaires européens” pour le modèle italo-albanais de renvois.
Pourtant, en parallèle de ce débarquement très médiatisé de huit migrants, ce sont près de 2000 personnes qui sont arrivées sur l’île italienne de Lampedusa depuis le début de la semaine. Des chiffres qui font dire à l’opposition que la politique du gouvernement relève plus du symbole que d’une réelle gestion des flux.
L’accord avec l’Albanie apparaît en effet très limité dans sa portée. Il exclut certaines catégories vulnérables (mineurs, femmes, personnes nécessitant des soins) ainsi que les migrants ayant déjà atteint le sol italien. Des exceptions qui réduisent grandement le nombre de personnes concernées.
Une course d’obstacles juridiques et diplomatiques
Au final, entre revers juridiques et faible impact sur les arrivées, la politique de renvois de migrants en Albanie ressemble à une course d’obstacles pour le gouvernement italien. Mais Giorgia Meloni ne semble pas prête à revoir sa copie, malgré les critiques.
Reste à savoir si l’intérêt des partenaires européens, mis en avant par Rome, se concrétisera réellement. Et si les juges européens, plusieurs fois saisis, valideront sur le fond ce modèle contesté. Le feuilleton des débarquements de migrants en Albanie est loin d’être terminé.