Les relations commerciales transatlantiques risquent de connaître de fortes turbulences avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche. Le nouveau président américain n’a en effet pas caché pendant sa campagne sa volonté de durcir les droits de douane pour inciter les entreprises à relocaliser leur production aux États-Unis. Une menace particulièrement inquiétante pour une Europe qu’il qualifie de “mini Chine” abusant de la bienveillance américaine.
Trump veut taxer massivement les importations européennes
En octobre dernier, le futur locataire de la Maison Blanche comparait l’Union Européenne à un partenaire commercial déloyal profitant des États-Unis en accumulant des excédents massifs année après année. Selon ses propres mots :
Ils ne prennent pas nos voitures, ils ne prennent pas nos produits agricoles, ils ne prennent rien.
Pour remédier à ces déséquilibres, le républicain envisage une hausse générale des droits de douane comprise entre 10 et 20% sur l’ensemble des produits entrant sur le sol américain. Une décision unilatérale qui pourrait porter un coup dur aux exportations européennes outre-Atlantique.
Des réactions mitigées en Europe
Face à cette menace, les dirigeants européens tentent de faire front commun, non sans difficulté. Le président français Emmanuel Macron, qui a échangé avec le chancelier allemand Olaf Scholz, a appelé à une Europe plus unie, plus forte et plus souveraine dans ce nouveau contexte. Un discours qui tranche avec la réaction plus prudente du gouvernement allemand se contentant d’évoquer la poursuite d’une coopération constructive et mutuellement bénéfique entre les deux rives de l’Atlantique.
La présidente de la Commission Européenne Ursula von der Leyen a quant à elle insisté sur l’importance du partenariat transatlantique pour les emplois et les investissements des deux côtés, sans pour autant mentionner une quelconque quête de souveraineté. Des approches divergentes qui illustrent toute la difficulté à définir une ligne commune face au défi posé par l’administration Trump.
Le casse-tête de la politique commerciale européenne
Car traditionnellement, l’UE a toujours défendu le libre-échange, conformément à l’idéologie mercantiliste allemande. Elle répugne ainsi à recourir à des mesures protectionnistes pour défendre son industrie, même confrontée à un traitement déloyal. Un dogme de plus en plus contesté, en France et en Italie notamment, qui plaident pour une Europe moins naïve afin d’éviter son déclassement économique face aux géants américain et chinois.
Les Européens resteront-ils unis face à Trump et capables d’identifier un intérêt européen commun ? Cela va être compliqué.
s’inquiète Sylvie Matelly, directrice de l’Institut Jacques Delors.
Selon l’experte, la politique commerciale européenne pourrait être la première victime de l’élection de Trump. L’Allemagne, qui vend énormément de voitures aux États-Unis, risque ainsi de freiner toute réaction européenne aux futures taxes douanières.
L’Europe prise en tenaille entre les subventions américaines et chinoises
Un problème d’autant plus épineux que l’UE subit déjà de plein fouet le plan protectionniste américain de subventions aux industries vertes (Inflation Reduction Act) décidé par Biden, au détriment des concurrents européens fragilisés par la flambée des prix de l’énergie suite à la guerre en Ukraine. Une pression accrue par les aides publiques massives de Pékin à l’industrie chinoise, en particulier dans le domaine des véhicules électriques.
Pour y répondre, les 27 ont certes réussi à imposer fin octobre des droits de douanes sur les voitures électriques chinoises malgré l’opposition des constructeurs allemands très implantés en Chine. Mais cette unité sera-t-elle durable face aux assauts répétés des deux superpuissances ?
Seule certitude, les relations commerciales de l’Union Européenne avec ses deux principaux partenaires s’annoncent particulièrement tendues dans les prochains mois. Sa capacité à défendre ses intérêts sans céder aux pressions ou divisions sera plus que jamais mise à l’épreuve. L’avenir de secteurs clés comme l’automobile ou les énergies renouvelables, et les millions d’emplois qui en dépendent, est en jeu.