Lors d’un débat houleux sur le plateau de la chaîne américaine CNN, le stratège politique républicain Scott Jennings a créé la polémique en affirmant que “l’Américain moyen qui a été écrasé, insulté et traité avec condescendance a pris sa revanche” lors des dernières élections présidentielles. Une déclaration choc qui a mis le feu aux poudres et relancé le débat sur le rôle et l’influence des médias dans le paysage politique américain.
Des propos qui font réagir
Les propos de Scott Jennings n’ont pas manqué de faire réagir les autres invités présents sur le plateau de CNN. Certains ont vivement contesté cette vision, arguant que les médias avaient un devoir d’information et d’analyse, et ne pouvaient être tenus pour responsables du résultat des urnes. D’autres au contraire, ont abondé dans le sens du stratège républicain, pointant du doigt l’arrogance et le mépris d’une certaine élite médiatique déconnectée des réalités et des préoccupations des Américains ordinaires.
Les médias dominants ont passé leur temps à dénigrer et à caricaturer ceux qui ne pensent pas comme eux. Ils ont créé un fossé, une fracture. Et aujourd’hui ils s’étonnent du résultat ?
– Un analyste politique
Une Amérique silencieuse qui reprend la parole
Pour Scott Jennings et ceux qui partagent son analyse, cette élection marque le réveil d’une Amérique dite “silencieuse”, celle des forgotten men, ces oubliés que les médias et les élites auraient selon eux cessé d’écouter et de comprendre depuis bien longtemps. Une Amérique des classes populaires et moyennes, qui se sent souvent méprisée, incomprise, voire même trahie.
En votant massivement contre les candidats perçus comme adoubés et soutenus par les grands médias, ces électeurs auraient ainsi voulu envoyer un message clair : leur voix compte et ils entendent bien la faire entendre.
Le spectre d’une société fracturée
Au-delà de la joute politique, la sortie de Scott Jennings et les vives réactions qu’elle a suscitées pose la question du rôle des médias dans une société de plus en plus polarisée. Beaucoup craignent que le fossé ne se creuse chaque jour davantage entre deux Amériques qui ne se parlent plus et ne se comprennent plus.
Il y a un vrai danger à ce que chacun s’enferme dans sa bulle de filtres, dans sa chambre d’échos. Les médias ont une responsabilité dans ce processus et se doivent d’être des passeurs, des traits d’union.
– Un sociologue des médias
Plutôt que d’attiser les tensions et les rancoeurs, beaucoup appellent ainsi à renouer le dialogue, à retisser des liens entre des univers qui tendent à s’ignorer. Un défi majeur pour les médias dans une Amérique qui semble chaque jour un peu plus écartelée entre deux réalités irréconciliables.
Quelle place pour les médias de demain ?
Face à ces constats alarmants, de nombreuses voix s’élèvent pour repenser en profondeur la place et le rôle des médias à l’heure du tout numérique et des réseaux sociaux. Comment assurer une information de qualité, rigoureuse et impartiale, tout en étant à l’écoute des attentes et des préoccupations du plus grand nombre ?
- Diversifier les rédactions et les perspectives
- Réinvestir le terrain et donner la parole aux “invisibles”
- Lutter contre les fake news et la désinformation
- Favoriser le dialogue et le débat plutôt que les invectives
Autant de pistes qui sont aujourd’hui au coeur des réflexions pour tenter de réconcilier les médias avec une part croissante de l’opinion publique qui semble s’en détourner. L’enjeu est de taille, car c’est ni plus ni moins que l’avenir de la démocratie qui se joue. Dans un monde confronté au risque grandissant du repli identitaire et de la défiance envers les institutions, les médias se doivent plus que jamais d’incarner un espace de liberté, de pluralisme et de débats ouverts. Un espace où toutes les voix peuvent se faire entendre et être prises en compte.
La polémique déclenchée par les propos de Scott Jennings a le mérite de remettre ces questions essentielles sur le devant de la scène. Aux médias maintenant de se remettre en question et de prouver qu’ils peuvent encore jouer pleinement leur rôle de contre-pouvoir et de vigie démocratique. L’avenir du débat public en dépend.