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Sénégal : Macky Sall Accuse Ses Successeurs D’Inaction Face Aux Urgences

L'ancien président Macky Sall a lancé de graves accusations contre ses successeurs, les blâmant pour la "situation catastrophique" du Sénégal à l'approche des législatives. Inaction face aux urgences, gouvernance basée sur le populisme et la manipulation... Les critiques fusent, présageant une campagne électorale tendue.

À l’approche des élections législatives sénégalaises prévues pour le 17 novembre, l’ancien président Macky Sall a publié une lettre incendiaire dans laquelle il accuse ses successeurs d’avoir plongé le pays dans une “situation catastrophique” par leur inaction face aux multiples urgences auxquelles le Sénégal est confronté. Ces accusations interviennent dans un contexte politique tendu, sept mois seulement après la défaite du candidat désigné par M. Sall à la présidentielle.

Un constat alarmant après sept mois de nouvelle gouvernance

Dans sa missive publiée sur les réseaux sociaux, l’ex-chef d’État, qui dirige la liste de son camp pour les législatives, dresse un bilan accablant des premiers mois de la nouvelle équipe au pouvoir. Selon lui, “le reniement, le populisme, les contre-vérités et la manipulation tiennent lieu de mode de gouvernance”, tandis que “le temps de la parole stérile a remplacé le temps de l’action utile aux populations, au moment où des urgences sont partout signalées”.

Macky Sall, qui se targue d’avoir laissé un Sénégal sur la voie de l’émergence après 12 années à la tête du pays, brosse un tableau très sombre de la situation actuelle. Il estime que des secteurs clés tels que l’agriculture, la pêche, l’artisanat, le petit commerce et le bâtiment se trouvent dans un état “catastrophique”, à peine sept mois après l’arrivée au pouvoir de ses successeurs.

Des accusations de manipulation et de mensonge

L’ancien président ne mâche pas ses mots à l’encontre du gouvernement actuel qui, selon lui, aurait “calomnié” son bilan en affirmant avoir trouvé des comptes publics dans un état désastreux. Il fait notamment référence aux déclarations du Premier ministre Ousmane Sonko, qui a accusé les anciens dirigeants d’avoir falsifié les chiffres et menti aux partenaires étrangers, dont le Fonds monétaire international (FMI).

M. Sall qualifie ces allégations de “calomnieuses” et affirme qu’elles ont poussé deux agences de notation à revoir à la baisse la note souveraine ou la perspective du Sénégal sur les marchés financiers. Une situation qui risque de compliquer l’accès du pays aux financements internationaux.

Le FMI suspend son programme d’aide

Les accusations portées par le gouvernement actuel semblent avoir déjà eu des conséquences concrètes. Un porte-parole du FMI a en effet confirmé que l’institution avait suspendu son programme d’aide en cours “en attendant que la Cour des comptes sénégalaise valide le rapport d’audit” dont l’exécutif a présenté les conclusions en septembre.

Le Fonds a par ailleurs indiqué qu’il n’ouvrirait pas de discussions sur un nouveau programme “avant que la situation ne soit clarifiée par les autorités sénégalaises”. Une décision qui risque de priver le Sénégal d’une précieuse source de financement, alors que le pays fait face à de nombreux défis économiques et sociaux.

Une campagne électorale sous haute tension

La publication de cette lettre à quelques semaines des élections législatives laisse présager une campagne particulièrement tendue. Macky Sall, qui a quitté le Sénégal après la présidentielle de mars, a d’ores et déjà prévenu que son retour pour participer aux élections était “très improbable”.

Son absence ne devrait toutefois pas empêcher son camp de livrer une féroce bataille à la coalition au pouvoir pour tenter de reprendre le contrôle de l’Assemblée nationale. Celle-ci avait été dissoute en septembre par le nouveau président Bassirou Diomaye Faye, alors qu’elle était encore largement dominée par les partisans de l’ancien chef de l’État.

Les prochaines semaines s’annoncent donc décisives pour l’avenir politique du Sénégal. Les électeurs devront trancher entre deux visions radicalement opposées : celle des anciens dirigeants qui se posent en garants de la stabilité et du développement, et celle de la nouvelle équipe qui promet de rompre avec un passé qu’elle juge marqué par l’injustice et la corruption.

Un bilan controversé et un héritage disputé

Au cœur de cette bataille se trouve l’épineuse question du bilan de Macky Sall. Pour ses partisans, l’ancien président a transformé le Sénégal en 12 ans de pouvoir, posant les bases d’une économie plus solide et d’une société plus équitable. Ils mettent en avant les progrès réalisés en matière d’infrastructures, d’accès aux services de base et de lutte contre la pauvreté.

Ses détracteurs dressent un portrait bien différent, dénonçant un régime marqué par la concentration des pouvoirs, le clientélisme et les atteintes aux libertés. Ils accusent l’ancien président d’avoir instrumentalisé la justice pour museler l’opposition et étouffer les scandales de corruption qui ont éclaboussé son entourage.

La vérité se situe sans doute entre ces deux extrêmes. Si le Sénégal a incontestablement progressé sous la présidence de Macky Sall, le pays reste confronté à de profondes inégalités et à une fragilité structurelle de son économie. La frustration d’une partie de la population, en particulier des jeunes, face au manque d’opportunités et à la cherté de la vie, a alimenté une contestation croissante ces dernières années.

Les défis de la nouvelle équipe dirigeante

C’est dans ce contexte que Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko ont été portés au pouvoir, surfant sur une vague de mécontentement et de désir de changement. Leur victoire a suscité d’immenses espoirs, mais aussi de profondes inquiétudes quant à leur capacité à gouverner un pays complexe aux multiples défis.

Sept mois après leur prise de fonction, force est de constater que les résultats se font attendre. Si l’on en croit Macky Sall, la situation se serait même dégradée dans plusieurs secteurs clés de l’économie. Un constat que le gouvernement conteste vigoureusement, accusant son prédécesseur de laisser une situation bien moins enviable qu’il ne le prétend.

Au-delà de cette bataille de chiffres, c’est la question de la gouvernance qui est posée. Les nouveaux dirigeants ont-ils les épaules pour redresser le pays et répondre aux attentes immenses de la population ? Leur gestion des premiers mois de mandat a montré certaines limites, entre tâtonnements, promesses non tenues et tensions internes.

Une nouvelle ère politique pour le Sénégal ?

Les élections législatives du 17 novembre constitueront un premier test grandeur nature pour la coalition au pouvoir. Si elle parvenait à remporter une majorité de sièges, elle disposerait des coudées franches pour mettre en œuvre son programme et tourner définitivement la page de “l’ère Macky Sall”.

Mais une victoire de l’opposition changerait radicalement la donne, ouvrant la voie à une potentielle cohabitation qui compliquerait la tâche du président Faye et de son Premier ministre. Un scénario qui pourrait déboucher sur une paralysie institutionnelle et raviver les tensions politiques dans un pays qui aspire avant tout à la stabilité et au progrès.

Quel que soit le résultat des urnes, une chose est sûre : le Sénégal est entré dans une nouvelle ère politique. Celle-ci sera marquée par une confrontation sans merci entre deux camps qui semblent irréconciliables, sur fond de défiance, d’accusations mutuelles et de luttes d’influence. Un contexte peu propice aux réformes et à l’apaisement dont le pays a pourtant cruellement besoin.

Il appartiendra aux acteurs politiques de faire preuve de responsabilité et de hauteur de vue pour éviter que cette bataille ne dégénère et ne mette en péril les acquis durement engrangés ces dernières années. Le Sénégal a tout à gagner d’un débat démocratique apaisé et constructif, focalisé sur les solutions plutôt que sur les invectives. C’est à ce prix que le pays pourra avancer sur le chemin d’un développement durable et inclusif, seul à même de répondre aux aspirations profondes de sa population.

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