Dans l’État de Géorgie, au cœur du sud-est américain, se joue actuellement un duel électoral d’une intensité rare. Cet ancien bastion républicain, devenu au fil des ans un « swing state » convoité, pourrait bien faire basculer l’élection présidentielle. Et le vote de la communauté afro-américaine s’annonce absolument décisif.
Une lutte acharnée pour conquérir l’électorat noir
Conscients des enjeux, les deux candidats, au coude-à-coude dans les sondages, multiplient les efforts pour séduire cet électorat clé. Pour Kamala Harris, première candidate noire à une présidentielle, le défi est de taille. Si elle peut compter sur un large soutien des femmes afro-américaines, conquises par son engagement en faveur du droit à l’avortement, la partie semble plus difficile du côté des hommes.
De son côté, Donald Trump joue une partition rodée, martelant que les migrants « volent » les emplois des Afro-Américains. Une rhétorique anxiogène, que dénonce Ronald Jordan, un habitant noir d’Atlanta : « Sa rhétorique sombre divise encore plus le pays. »
Le paradoxe du vote des hommes noirs
Car le vrai sujet d’inquiétude pour le camp démocrate, c’est l’abstention qui semble gagner les rangs des électeurs afro-américains, en particulier chez les hommes. D’après plusieurs témoignages recueillis sur le terrain, beaucoup ne semblent pas convaincus par Kamala Harris, sans pour autant soutenir Donald Trump.
Malheureusement, personne n’a pu me donner de raison.
Ronald Jordan, électeur afro-américain
Un constat que partage le maire de South Fulton, KobI : « Il faut demander aux élus : quelles politiques ont-ils mises en place pour les hommes noirs afin qu’ils aient le sentiment que leur vote compte ? »
Harris, une candidate « outsider » ?
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces réticences. Kamala Harris, entrée tardivement dans la course après le retrait de Joe Biden, souffre sans doute d’un déficit de notoriété face à un Donald Trump rompu à l’exercice présidentiel. Certains lui reprochent aussi son statut « d’outsider », une position toujours délicate pour une femme candidate au pouvoir suprême.
Chaque fois qu’une femme est en position d’arriver au pouvoir, elle sera toujours une outsider.
Ludwidg Louizaire, Miss Géorgie 2024
Un appel solennel d’Obama aux hommes noirs
Face à ces vents contraires, les soutiens de poids se mobilisent. À commencer par Barack Obama lui-même. Le premier président noir des États-Unis a imploré les hommes de la communauté de soutenir Kamala Harris, les appelant à ne pas confondre « l’intimidation et le fait de rabaisser les gens » avec « un signe de force ».
16 grands électeurs en jeu
L’enjeu est de taille : avec ses 16 grands électeurs, la Géorgie pourrait faire basculer l’élection dans un sens ou dans l’autre. Dans cet État où les démocrates peuvent traditionnellement compter sur le soutien des Afro-Américains, la mobilisation sera clé. Notamment dans le comté de Fulton, qui comprend la majeure partie d’Atlanta et où les bureaux de vote enregistrent pour l’instant une plus forte affluence des femmes que des hommes.
Si Kamala Harris l’emporte, elle le devra en grande partie aux femmes noires, fer de lance de sa campagne. Comme le résume Ludwidg Louizaire : « Il ne faut jamais négliger les femmes ». Mais sans le soutien massif des hommes de la communauté, la victoire pourrait lui échapper. Dans une élection qui s’annonce serrée, chaque voix comptera. Et le vote afro-américain, plus que jamais, sera scruté et décisif.