Plus de treize ans après la catastrophe nucléaire qui a frappé la centrale de Fukushima au Japon, une étape cruciale vient d’être franchie. Pour la première fois, des techniciens ont pu analyser le niveau de radiation de débris présents à l’intérieur d’un des réacteurs endommagés. Cette avancée ouvre la voie à des tests plus poussés, essentiels pour le titanesque chantier de déclassement du site qui s’étendra sur plusieurs décennies.
Un robot au cœur du réacteur accidenté
C’est grâce à des robots spécialisés, capables de résister aux radiations extrêmes, qu’un échantillon de débris radioactifs a pu être extrait de l’enceinte de confinement du réacteur. Une prouesse technologique réalisée par l’opérateur de la centrale, la Tokyo Electric Power Company (Tepco). Mardi, les équipes de Tepco ont procédé à la mesure du niveau de radiation de cet échantillon. Résultat : il est suffisamment bas pour permettre de passer à la suite des opérations.
Des tests plus poussés à venir
Fort de ce premier succès, Tepco compte maintenant transférer l’échantillon vers un centre de recherches afin d’y mener des analyses approfondies. L’objectif : étudier cet infime prélèvement pour glaner de précieux indices sur l’état à l’intérieur des réacteurs accidentés. Des informations capitales pour guider les prochaines étapes du déclassement de la centrale.
880 tonnes de débris hautement radioactifs
Mais l’ampleur de la tâche reste colossale. Selon les estimations, il resterait encore environ 880 tonnes de débris hautement radioactifs à l’intérieur des trois réacteurs qui étaient en fonctionnement lorsque le tsunami dévastateur a frappé la côte nord-est du Japon le 11 mars 2011. Une vague géante qui a provoqué la pire catastrophe nucléaire depuis Tchernobyl, en faisant fondre les systèmes de refroidissement des réacteurs.
Le défi titanesque du retrait des débris
Extraire ces débris ultra-radioactifs représente l’un des plus grands défis du projet de déclassement de Fukushima, qui devrait s’étendre sur plusieurs décennies. Les niveaux de radiation sont tels à l’intérieur des réacteurs accidentés que même les robots peinaient jusqu’à présent à y fonctionner. Il aura fallu à Tepco des années de recherche et développement pour mettre au point des machines capables de résister à cet environnement extrême.
“Le retrait des débris est considéré comme le défi le plus délicat du projet de déclassement de la centrale”, souligne un expert du nucléaire proche du dossier.
Rejet controversé d’eau dans le Pacifique
Autre question épineuse : que faire de l’eau contaminée s’accumulant sur le site ? Le Japon a commencé fin août 2023 à rejeter dans l’océan Pacifique de l’eau stockée dans la centrale après traitement. Une opération vivement critiquée par certains pays voisins comme la Chine, bien qu’avalisée par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). En réaction, Pékin, puis Moscou, avaient suspendu leurs importations de produits de la mer japonais.
Mais en septembre, la Chine a indiqué qu’elle reprendrait progressivement ses achats. Un geste d’apaisement qui témoigne de la volonté de Pékin de renouer le dialogue avec Tokyo malgré ce désaccord. Cependant, la méfiance persiste chez les consommateurs chinois, et plus largement dans l’opinion publique des pays de la région.
L’analyse des premiers débris radioactifs extraits des réacteurs accidentés marque donc une étape importante, mais le chemin est encore long pour Tepco et les autorités japonaises. Chaque avancée dans le dantesque chantier de déclassement de la centrale ravivera inévitablement les peurs et les critiques, au Japon comme à l’international. Un défi technique et diplomatique qui nécessitera pédagogie et transparence.